Lutte des places
« Et les nominés sont : Ségolène, Martine et Bertrand ! (applaudissements)
Merci pour eux ! La semaine prochaine, nous nous retrouverons ici-même pour la finale. D’ici-là, n’oubliez pas d’appeler notre n° surtaxé (20 euro l’appel) pour les départager : tapez « 1 » pour Ségolène, « 2 » pour Martine et « 3 » pour Bertrand ! A la semaine prochaine pour vivre en direct la finale de la PS Academy ! »
Caricature ou réalité ? La vacuité programmatique des candidats ayant encore une chance de l’emporter [1] au Congrès de Reims laisse penser qu’on est assez près de la réalité. Alors que le capitalisme tremble sur ses bases, au PS on en est toujours à la lutte des places. Alors que le libéralisme auto-régulé montre enfin son vrai visage, au PS on en est toujours à chercher qui sera capable de battre Sarkozy et de ramener le PS au pouvoir. Avec quel programme ? Les enquêtes d’opinion [2]se chargeront de le définir.
Et à ce petit jeu des chaises musicales, Ségolène Royal est sûrement la plus habile. Après avoir réussi son hold-up sur le parti en se faisant désigner candidate à la Présidence de la République, elle est en passe de réussir à nouveau. Celle qu’on disait marginalisée par son échec de la Présidentielle [3] a coiffé tout le monde sur le poteau. Le Ségo-Show a porté ses fruits : elle reste la préférée des militants socialistes.
Sauf à pratiquer la politique de la terre brûlée dite du « TSS » (Tout Sauf Ségolène), on voit mal comment ses concurrents pourraient l’empêcher de prendre les rennes du parti [4] . Car le « TSS » c’est l’implosion quasi assurée du parti. C’est se mettre à dos une bonne part des militants, et une part sûrement plus grande encore de l’opinion. La stratégie de Ségolène, c’est la victimisation. Plus les critiques se font virulentes à son endroit, plus elle se renforce.
D’autant que des fissures apparaissent. Le départ de Jean-Luc Mélenchon est significatif : la gauche du PS ne supporte plus son parti. Sauf que la gauche de la gauche est déjà bien occupée par Olivier Besancenot et son NPA. Sauf qu’à peine a-t-il claqué la porte, Jean-Luc Mélenchon se tourne vers les communistes, comme si lui non plus n’arrivait pas à renouveler son programme : la gauche, c’est le Programme Commun ! Sauf qu’en 1972, le PC pesait plus de 20% de l’électorat.
En 2004, Sarkozy a raflé l’UMP. En 2007, Bayrou a fait un putsch à l’UDF et a créé le MoDem. En 2008, Besancenot a dissout le LCR pour créer le NPA [5] . À chaque fois, une personnalité forte et médiatique s’est imposée face aux caciques du parti. Ségolène Royal n’emploie pas une autre stratégie. Qu’on le souhaite ou qu’on le regrette, elle a toutes ses chances pour parvenir à ses fins : s’imposer au PS.
[1] Ségolène Royal (29%), Bertrand Delanoë et Martine Aubry (25% chacun). Benoit Hamont, dont la motion représentait toute l’aile gauche du PS, a fait 19%.
[2] Nul doute sur leur fiabilité : 2 jours avant le vote, un sondage donnait Delanoë largement vainqueur avec 30% contre 19% à Ségolène Royal !
[3] Echec tout relatif quand on sait le peu de soutien qu’elle a reçu de son parti
[4] Directement, ce qui est peu probable, ou par l’intermédiaire d’un prête-nom
[5] Le congrès de fondation du NPA se tiendra les 30 et 31 janvier et le 1er février 2009, le congrès de dissolution de la LCR intervenant le 29 janvier 2009