Dimanche alibi ?

vendredi 19 décembre 2008 à 07:20, par clarinette

Dans La Croix du 16 décembre, une intervention de Martine Aubry, à propos du travail le dimanche. J’ai d’abord trouvé tout ça très bien...

La question d’un jour

Les choses sont dites clairement, mais comme chaque fois, lorsque je lis les débats sur cette question, j’ai un peu le sentiment qu’on s’arrête en chemin. La question du dimanche est intéressante, mais pourquoi cette impression qu’elle cache un autre débat ? Et pourquoi aussi une telle mobilisation, des politiques, des religieux, de tout un chacun (cf ici par exemple) etc...

Hypothèse : il peut être bien utile de (se) mobiliser sur la belle idée du "septième jour", afin de ne pas regarder en face la réalité des jours, de chaque jour et de tous.

Exemples :

 sur le choix de societé en jeu derrière cette histoire d’ouverture du dimanche : "Voulons-nous une société de consommation où l’acquisition de biens matériels devient l’alpha et l’oméga de toutes choses ?" ...là rien de neuf : dimanche ou pas dimanche, si on travaille plus pour gagner plus, c’est pour dépenser plus. Une majorité a voté pour ce choix de société... Dimanche ou pas dimanche, voulons-nous de cette société là ?...

 sur le recul nécessaire, face à la consommation comme modèle unique d’épanouissement : Le dimanche n’est pas un jour comme les autres : "remettre cela en cause, c’est à nouveau privilégier une société de l’« avoir » et pas de l’« être ». Un jour d’arrêt dans la consommation, c’est un temps pour soi, un temps pour sa famille, un temps pour les autres." Bon... Là encore, dimanche ou pas dimanche, la question se pose. Les six autres jours, pas de temps pour soi ? ni pour sa famille ? ni pour les autres ?... si c’est le cas, il y a peut-être urgence à y réfléchir, non ???

 sur le temps particulier du dimanche : "C’est le moment où les hommes et les femmes se tournent les uns vers les autres, pour réfléchir au-delà du stress du travail, ou tout simplement prennent du temps pour eux. C’est le moment où les parents ont le temps de parler à leurs enfants." Là encore, espérons que les parents parlent un peu à leurs enfants les six autres jours :-)

La "folie de la consommation"... du dimanche.

Il y a de belles envolées chez Martine Aubry : "Ce jour-là est aussi celui où l’on prend le temps de s’occuper des parents âgés. C’est aussi, pour ceux qui croient, un temps de spiritualité. Tout cela est pour moi absolument essentiel dans la société que nous voulons. La folie de la consommation, on le sait, n’a jamais fait le bonheur des hommes.", ou "L’état de développement d’une société ne peut pas se mesurer à l’aune du nombre de téléphones portables ou de matériels électroniques que l’on pourrait désormais acheter aussi le dimanche, mais à notre capacité à bien vivre tous ensemble, quelles que soient nos différences d’âge ou d’origine sociale et culturelle."

Mais pourquoi limiter ces questions au seul dimanche ? Ne sont-elles pas valables pour les autres jours de la semaine ? Celle de l’"état de notre société" ne se pose-t-elle pas aussi les six autres jours ?!... Suffira-t-il de magasins fermés un jour dans la semaine pour améliorer l’"état" de notre société, ou pour s’en satisfaire ?

Les beaux esprits du dimanche

Je cherchais depuis longtemps ce qui me gênait dans le débat pour ou contre le travail du dimanche : j’ai trouvé, grâce à l’interview de Martine Aubry... : Parmi les beaux esprits qui revendiquent le repos dominical et sa cohorte de belles actions (repas familiaux, activités sportives, promenades en campagne, bricolage à la maison, non-consommation, pratique religieuse, etc), peu élargissent le champ de vision et osent poser le problème de la qualité de vie durant les six autres jours.

Le dimanche est peut-être un bel alibi... et une aubaine pour mobiliser l’opinion sur un débat peu gênant finalement. Un os à ronger... : Continuons à nous mobiliser contre l’ouverture des magasins le dimanche (ou pour, d’ailleurs...), c’est un très bon moyen de continuer à ne pas réfléchir trop, et surtout à ne rien changer les autres jours. Sont-ce les mêmes qui arpentent avec frénésie les galeries marchandes le samedi, qui dotent leurs enfants de portables dès le CM2, qui changent le leur tous les ans, qui font des heures sup pour payer la nounou qui garde les gosses 10 ou 12 heures par jour, qui prennent la voiture pour aller à l’école, qui se trouvent fatigués... et qui en même temps réclament le repos dominical ? N’y a t-il pas une légère incohérence ?... N’est-ce pas au fond le même débat ?...

Quelle vie on veut...

Dimanche ou pas dimanche : ce n’est pas la seule question, et sans doute même pas la vraie question. La question, ce n’est pas "quel dimanche on veut" , mais "quelle vie on veut, chaque jour"... et là, on n’évitera pas les mots de sobriété, de simplicité volontaire, de décroissance,.. d’"être" plutôt qu’"avoir"...

commentaires
Dimanche alibi ? - 29 décembre 2008 à 20:15
#20976
Dimanche alibi ? - Amar - 24 décembre 2008 à 16:43

Qu’est-ce qui fait du dimanche un jour si particulier ?

C’est tout simplement qu’il est en rupture avec tous les autres jours de la semaine ; consacrés eux exclusivement à toutes sortes d’activités qui exigent de nous toujours un peu plus de temps.

Or le temps c’est de l’argent ! On voudrait pour cela, sans contrepartie aucune, exiger de nous, une fois encore, qu’il soit consacré à autre chose que de le prendre et plutôt le perdre comme son argent, pour quoi ? au profit de qui ?
Ce serait là, en deux temps trois mouvements, nous voler et notre argent, et notre temps.

Faire du dimanche un jour comme les autres c’est se priver de prendre son temps : le temps de se lever, le temps de faire une pause, le temps aussi de mettre un bémole au train-train quotidien et enfin parceque le temps nous est compté, prendre son temps avant de s’éteindre éternellement.

Voilà ce qui fait du dimanche un jour si particulier. Et c’est bien dommage qu’il n’y ait que le dimanche pour prendre son temps...


#19135
Dimanche alibi ? - bertrand - 23 décembre 2008 à 17:10

Idéalement chacun devrait avoir chaque jour le temps de penser à lui et aux siens, de s’occuper des ses vieux, de se reposer, d’avoir des loisirs...
Ensuite le dimanche est aujourd’hui le seul temps de pose que la société accorde à beaucoup (soyons lucide y’a bien 10% de salariés qui bossent le dimanche).
Ensuite, de deux choses l’une, soit on donne trois à quatre jours de congés par semaine et les gens auront le temps de tout faire, seul et collectivement, soit on sanctuarise (je suis athée) un jour pour tout ce qui est collectif et en dehors du champ de l’économie.
L’essentiel de la vie en société ce n’est pas l’économie, c’est tout le reste.


#19128
L’UMP lance une pétition pour le travail dominical - B. Javerliat - 22 décembre 2008 à 21:17

Frustrés d’avoir vu leur projet de loi inique reporté à 2009, les intégristes de l’UMP ont lancé une pétition en faveur du travail dominical qui revendiquerait 16.000 signatures.

On est cependant bien loin du chiffre de la pétition contre le travail dominical qui en est bientôt à son 60.000 signataire


Voir en ligne : Collectif des amis du dimanche
#19127
Dimanche alibi ? - 20 décembre 2008 à 18:14

« Quelle vie on veut... »

On a plutot celle qu’on peut, non ?


#16676
Dimanche alibi ? - michel - 20 décembre 2008 à 16:52

Moi aussi je ne peux qu’être tout à fait d’accord... Faut revoir non seulement le Dimanche, mais également le reste... et je sais de quoi je parle, pour avoir sans doute plusieurs fois dépassé la mesure


#16675
Dimanche alibi ? - 19 décembre 2008 à 16:20

TOUT CELA EST BEL ET BON MAIS SI ON BANALISE LE DIMANCHE ON SUPPRIME LE DERNIER REMPART CONTRE UNE SOCIETE "TOUT CONSOMMATION"


#16364
Dimanche alibi ? - Nicolas O - 19 décembre 2008 à 09:41

Comment fait-on pour dire qu’on est tout à fait d’accord ?
Ha ? Ca y est, c’est fait ?


#16106