Quand le Berry se pose des questions sur le train

jeudi 11 février 2010 à 08:06, par bombix

Le Berry Républicain quitterait-il les voies bien balisées du « politiquement correct » ? Un récent article de Franck Simon sur la situation du rail ne nous entretient pas, pour une fois, du dernier site internet de l’UMP pour la promotion du TGV dans le grand Centre [1]. Il admet même que l’avenir du TGV a un peu de plomb dans l’aile. Reprenant une information dont nous nous faisions l’écho ici-même il y a quelques temps, le Berry écrit « la SNCF ... laissait filtrer récemment son intention de réduire son offre de déplacements en TGV faute d’une rentabilité porteuse [...] Peu d’attentes à avoir donc du côté de l’État pour inciter les usagers à prendre le train plutôt que la voiture. » Non, quelle surprise ! Malgré les chants d’amour émouvants entonnés lors du Grenelle de l’environnement à la gloire du train et de ses avantages du point de vue de la cause environnementale, les efforts de l’Etat seraient encore bien timides ? ...

Reste donc aux Régions d’agir. Ben voyons. « Cent trente millions de tonnes de marchandises sont transportées sur le territoire régional dont la moitié en trafic national. Un chiffre de trafic important sauf que 95 % de ces marchandises sont transportées non par le rail mais par la route. » Exact. Dommage que M. Simon ne poursuive pas. Pour quelles raisons la route a pris un tel avantage sur le train ? C’est que le camion a toujours été l’enfant chéri des politiques. « Si le droit du travail et les réglementations de sécurité étaient rigoureusement respectés par les entreprises de transport routier, les coûts du transport de marchandises par camions seraient supérieurs d’environ 20 %. » écrivait JP Besset dans un article du Monde du ... 26 novembre 1996 [2], il y a presque 15 ans ! Dans le même article on apprenait que « L’Etat a encouragé le mouvement en offrant au fret routier des conditions de concurrence extrêmement favorables par rapport au rail (dont le fret a diminué de 13 % depuis 1985), bien que, selon l’Agence de l’environnement et de maîtrise de l’énergie (Ademe), un camion de 35 à 40 tonnes consomme deux fois et demi plus d’énergie qu’un train complet pour transporter une tonne de marchandises sur un kilomètre. »

Bref le déséquilibre entre le train et la route, aux avantages de la route, est la conséquence d’une volonté politique ancienne, jamais démentie. Le Grenelle de l’environnement n’y a rien changé. Il a simplement fait preuve de beaucoup d’hypocrisie, mode de l’écologie oblige.

Le Berry intitule son article L’avenir du train face à la rentabilité ... comme si les conditions économiques du moment étaient seules déterminantes dans cette affaire. Belle façon de passer sous silence l’essentiel.

Que nos politicards soient rassurés, le Berry Républicain ne déroge toujours pas au politiquement correct — sur la question du train comme sur bien d’autres dossiers régionaux.

[1cf. Un site internet à grande vitesse. Ouah, ça c’est du titre ! On ne saura pas son coût. Plus de 1100 euros HT ?

[2Des conditions de travail imposées par le choix du « tout-camion », Jean-Paul Besset et Sylvia Zappi, Le Monde 26-11-96


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commentaires
Quand le Berry se pose des questions sur le train - Stose - 12 février 2010 à 08:11

Donner des chiffres qui ont 15 ans pour soutenir une situation d’aujourd’hui ne me semble que peu crédible.
Le taux de remplissage de l’autoroute ferroviaire Bettembourg-Perpignan (2200 PL en novembre pour 4 aller-retours par jour) est d’environ 35%. Donc, même s’il était vrai qu’un train complet consomme 2,5 fois moins qu’un camion, la performance environnementale des deux modes, en tenant compte des taux de remplissage, s’en trouve identique.
Si, à titre personnel, pour effectuer un trajet, vous deviez mettre deux à trois fois plus de temps, avec une date d’arrivée à + ou - deux jours près, choisiriez vous le rail plutôt que la voiture ? C’est le même problème pour les marchandises. Comment voulez-vous faire tourner une industrie avec des transports qui ne seraient pas en capacité de vous livrer vos pièces dans les délais ?
La route rapporte 30 milliards d’euro par an, le système ferroviaire en coûte 12 milliards aux finances publiques. Plus on fait rouler des trains, plus on paye d’impôts.
L’échec du train vient uniquement au fait qu’il n’est pas adapté à notre société de consommation mondialisée. Ne pas accepter la réalité ne peut conduire qu’à continuer à isoler la France dans sa suffisance.


Quand le Berry se pose des questions sur le train - B. Javerliat - 12 février 2010 à  08:48

Comment voulez-vous faire tourner une industrie avec des transports qui ne seraient pas en capacité de vous livrer vos pièces dans les délais ?

Y’a un truc tout con pour ça : avant ça s’appelait les stock. Quand on a du stock, on n’est pas "à + ou - deux jours près". Mais le stock, ca bouffe de la trésorerie, et maintenant on préfère payer grassement les actionnaires plutot que de financer du stock. C’est ça aussi, la suffisance de la mondialisation.

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Quand le Berry se pose des questions sur le train - Solomon - 20 mars 2010 à  11:11

ouloulou !!!!!!!!!!

Il y en a des choses à rectifier ici. Votre raisonnement sur les taux de remplissage des trains est également transposable aux poids-lourds qui, eux non plus ne sont pas systématiquement chargés à plein, loin s’en faut.

Reprenons donc les données de l’ADEME.

D’abord pour tous les modes de transports et par sous-catégories, l’ADEME prend en compte les taux de remplissage effectivement constatés qui sont le reflet de la performance de chacun des modes. Donc les comparaisons se font bien sur des données "alignées" et pertinentes.

Les données qui suivent fournies par l’ADEME sont donc bien rapportées à la tonne-km transportée en tenant compte des taux de remplissage. Les chiffres sont les suivants :

Poids lourds (maxicodes à plus de 25t de charges utiles) :
 taux de remplissage moyen 10,6 tonnes
 consommation d’énergie 25,83 gep (gramme équivalent pétrole) par tonne-kilomètre

Trains entiers
 taux de remplissage moyen 496,2 tonnes
 consommation d’énergie 3,2 gep/tonne-km pour les trains électriques et 13,84 gep/tonne-km pour les trains diesels

Comme on dit on aura beau tourner ça dans tous les sens : "ya pas photo"

Et encore on n’évoque même pas là l’effet sur l’émission de CO² si néfaste sur le climat. Là encore l’ADEME fournit les chiffres :

Poids lourds (maxicodes à plus de 25t de charges utiles) : 79 gramme par tonne-km

Trains entiers : 0 gramme par tonne-km pour les trains électriques et 44 gramme par tonne-km pour les trains diesels.

On pourrait aussi tenir compte dans les comparaisons d’autres effets indésirables comme l’insécurité routière (comparer le nombre de morts dans le ferroviaire et le routier), la congestion, ... Mais est-ce nécessaire ?

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