Résister n’est pas jouer !

mardi 26 octobre 2010 à 10:30, par Mercure Galant

Le lundi 18 octobre 2010 était inauguré à Bourges le nouveau musée de la Résistance et de la Déportation. Un groupe de manifestants s’était également invité à la cérémonie comme ce fut le cas les jours suivants au Conseil Général puis au Conseil municipal. Retour sur cet événement qui – en marge de la mobilisation contre la réforme des retraites - fit un peu de bruit sur la toile et dans le Landerneau politique local…

Résister n'est pas jouer !
Discours de Maurice Renaudat pendant l’inauguration

Rien ne va plus...

L’ouverture du nouveau musée, constitua l’aboutissement d’un projet porté depuis de nombreuses années par la volonté et la persévérance de l’Association des Amis de la Résistance et de la Déportation de Bourges et du Cher [1] soutenue en cela par les collectivités locales et par la fondation de la Résistance. Beaucoup espérait sans doute vivre là un beau moment consensuel, mais, le contexte social étant ce qu’il est, la polémique s’invita dès la fin des discours officiels, par l’intermédiaire d’une syndicaliste qui prit le micro à l’invitation du président du Conseil Général Alain Rafesthain. Quelques instants plus tard, Mme Delmas-Comolli, préfet du Cher, quittait les lieux en signe de protestation…

Ne jouons pas avec nos retraites !

Dans son édition du 19 octobre, le Berry Républicain évoque l’incident.

À Gauche, nombreux sont ceux qui approuvent l’action des manifestants. Si Irène Félix publie un billet dans lequel rien n’est dit de cette affaire, Yannick Bedin quant à lui rappelle sur son blog l’extrait qui a fait réagir la représentante de l’Etat :
"Comment peut-il manquer aujourd’hui de l’argent pour maintenir et prolonger ces conquêtes sociales, alors que la production de richesses a considérablement augmenté depuis la Libération, période où l’Europe était ruinée ? Les responsables politiques, économiques, intellectuels et l’ensemble de la société ne doivent pas démissionner, ni se laisser impressionner par l’actuelle dictature internationale des marchés financiers qui menace la paix et la démocratie".

Yann Galut n’est pas en reste puisqu’il écrit un premier billet dans le seul but de dénoncer l’attitude de la préfète. Puis il fait paraître un deuxième billet en fin de semaine où il compare à son tour le combat contre la réforme des retraites à celui de la Résistance pendant l’Occupation.

Enfin on a pu lire sur le gilblog, le témoignage d’un lecteur voulant réagir à l’attitude de Mme Delmas-Comolli jugée par lui aussi inacceptable.

Ne jouons pas avec les symboles !

Les commentaires désapprouvant l’action des syndicalistes sont plutôt rares sur le net. Notons toutefois la manière dont Bourges-info résume l’affaire :
"Beaucoup de monde, beaucoup de discours et puis le clash avec l’intervention des syndicalistes de "Sud", et le départ de nombreuses personnalités dont madame le préfet, les représentants de la ville de Bourges et de nombreuses autres personnalités.
Finalement une inauguration ratée, et un musée qui commence sous le symbole de la division, et non de la mémoire que chacun doit à ses morts."

Les jeux sont faits !

Bref que penser de tout cela ? Fallait-il aborder le débat sur les retraites à l’occasion de cette inauguration ? Puisque l’actuel système des retraites est bel et bien issu du programme du Conseil National de la Résistance mis en place à la libération, il ne paraissait pas inconcevable d’envisager une telle intervention toute symbolique. A contrario il semble paradoxal de s’en indigner quand on vient d’applaudir des deux mains à l’évocation des combats menés pendant cette sombre période de notre histoire, alors même que les actes de désobéissance furent magnifiés à travers les discours de la soirée. Certes, l’image d’une belle Union sacrée honorant d’une seule et même voix la Résistance est écornée. Est-ce si grave ? Y eut-il d’ailleurs toujours un véritable consensus dans les rangs de la Résistance ? On sait bien que non...
La seule chose dont on soit sûr au final c’est qu’à sa manière Mme la préfète a su faire acte de résistance… Résistance au péché de gourmandise en s’évitant ainsi un détour par le buffet copieusement garni qui attendait les invités en fin de cérémonie ! Et si c’était la raison toute bête de son départ précipité ?

[1Voir un précédent article à ce sujet.


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commentaires
Résister n’est pas jouer ! - Jean Jeanval - 31 octobre 2010 à 18:39

Le Conseil National de la Résistance a élaboré, entre autres projets, la mise en place des systèmes de retraites.
Le patronat collabo complètement déconsidéré à l’époque ne put que s’incliner. La charge contre le système des
retraites relancée par le mefef(voir les discours de Denis Kessler)a enfin abouti grace à un président représentant la finance et les banques. Son propre frère est un des premiers bénéficiaires de la retraite par capitalisation.
Rappeler celà lors d’une inauguration d’un "musée" de la résistance est à mon sens du meilleur effet. La résistance n’appartient pas à un passé "glorieux", elle doit s’exprimer en toutes occasions quand elle le juge utile. Particulièrement quand la politique actuelle contredit en tous points les aspirations et les valeurs de ceux qui ont lutté et sont morts pour ces valeurs.


Résister n’est pas jouer ! - Cyrano - 5 novembre 2010 à  10:43

Pour tout dire, lorsqu’arrive la Deuxième Guerre Mondiale, la France était particulièrement mal lotie en système de protection sociale. – alors que l’Allemagne de Bismarck avait mis en place, à la fin du XIXe siècle, un système de retraite qui avait inspiré toute l’Europe. La France se distingua et ne mettra en place un début de régime d’assurance sociale généralisée qu’avec les lois de 1930 – et en instituant une retraite par capitalisation.

L’inflation d’avant guerre montra vite les limites du système. La loi du 14 mars 1941 relative à l’allocation aux vieux travailleurs salariés stipulait dans son article 9 : « Les retraites et pensions de vieillesse des assurances sociales sont constituées sous le régime de la répartition. » Ainsi, la mise en place d’un système de retraite par répartition était dans l’air du temps. D’ailleurs, le Programme du Conseil National de la Résistance de mars 1944 n’estima pas utile de préciser le mode des retraites et ne mentionne qu’en une ligne le sujet : « une retraite permettant aux vieux travailleurs de finir dignement leurs jours ».

Pour relancer l’économie et disposer de la paix sociale, De Gaulle ne se fera pas prier pour mettre en place en France, enfin, un régime de protection sociale – et le système de retraites tel que nous le connaissons jusqu’à aujourd’hui.

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