Le pire n’est (presque) jamais certain

jeudi 12 mai 2011 à 08:50, par B. Javerliat
Le pire n'est (presque) jamais certain

Ça dégouline de partout. La « commémoration » de l’accession de la gauche au pouvoir de 1981 dégouline de tous les médias. Chaque élu socialiste est contraint de raconter « son 10 mai ».
Comme si le PS célébrait sa victoire d’il y a 30 ans pour conjurer la défaite annoncée à la présidentielle qui vient. Car c’est bien de cela qu’il s’agit. Malgré l’impopularité record du président sortant, c’est la quatrième défaite consécutive du PS qui se dessine.

Si l’élection de Mitterrand a été au mieux une désillusion, au pire une arnaque [1], l’homme s’était donné les moyens de son objectif : gauche unie - avec son hold-up sur le PC - et programme de gauche [2] : nationalisation des banques et des grands groupes industriels, augmentation du SMIC et réduction du temps de travail, 5è semaine de congés payés et retraite à 60 ans, entre autres. Non seulement c’était au programme, mais ce fut fait.

30 ans plus tard, c’est un PS acquis au libéralisme et à l’européisme qui se présente. « Nationalisation » est devenu un gros mot et il n’est paraît-il pas « responsable » de maintenir la retraite à 60 ans ou d’augmenter le SMIC. Les différences idéologiques et programmatiques entre l’UMP et le PS sont si ténues, qu’on ne voit aucune raison de se déplacer pour voter : dans tous les cas, ça ne changera rien, ça continuera comme avant. Mais ça n’est peut-être pas le pire.

Au lieu de regarder 30 ans en arrière (quel programme ! ), le PS ferait mieux d’analyser sa défaite d’il y a 10 ans, quand il ne fut même pas au second tour, distancé par le FN. Car si aucune des conditions qui ont permis l’élection de Mitterrand ne sont aujourd’hui réunies, toutes celles qui ont amené Jospin à la défaite en 2002 le sont, elles. « Mon programme n’est pas socialiste » avait-il dit. Résultat : Chirac fut élu avec 82% des suffrages, un score de dictateur. Mais Chirac n’était pas un dictateur refoulé. On ne peut pas en être aussi certain avec Sarkozy...

[1On ne va pas revenir sur le revirement à 180° de Mitterrand en 83, la littérature sur le sujet est abondante

[2Lire ou relire les 110 propositions du candidat Mitterrand en 1981


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Le pire n’est (presque) jamais certain - Eulalie - 12 mai 2011 à 11:02

J’aime bien la ressortir celle-là, à chaque fois qu’on commémore Mitterand (ceci dit, c’est bien la première fois qu’on voit ainsi fêter mai 81, c’est pathétique tellement c’est gros leur com’) : Savez-vous pourquoi Mitterand a été enterré au cimetière de Jarnac ?.... Parce qu’il n’y avait plus de place dans celui de Jencule.


Le pire n’est (presque) jamais certain - bombix - 12 mai 2011 à  14:00

Oui ... mais que l’arbre Mitterrand n’empêche pas de voir la forêt socialiste. Que dire de toute cette extrême gauche convertie à la sociale-démocratie dans le milieu des années 80, à l’instar de JC Cambadélis, venu d’une chapelle trotskiste (l’OCI), et aujourd’hui bras droit du patron du FMI ?
Je dis ça parce que la focalisation sur le personnage Mitterrand, d’une part évite de parler du programme du PS pour 2012, et d’autre part fournit un bouc émissaire idéal pour faire silence sur les forces politiques et les autres acteurs de la période noire des années 80.

Répondre à ce message #32325 | Répond au message #32315
Le pire n’est (presque) jamais certain - Eulalie - 12 mai 2011 à  15:03

C’est vrai, faut pas déconner tout de même.

Répondre à ce message #32326 | Répond au message #32325
Le pire n’est (presque) jamais certain - Mister K - 12 mai 2011 à 10:42

30 ans plus tard, c’est un PS acquis au libéralisme et à l’européisme qui se présente.

Cette phrase est globalement très discutable. Car dire que le PS a intégré l’économie de marché et ne fait qu’accompagner l’économie devenue très libérale est une chose. Dire qu’il est acquis au libéralisme en est une autre. Il y a certes une aile libérale au PS, mais elle est pas, a priori, minoritaire.

Mais ce qui m’ennuie le plus dans cette phrase, c’est le mot "européisme". Le PS est clairement devenu un parti qui, majoritairement, est pro-européen. Le mot "européisme" ou "européiste" est devenu un mot particulièrement péjoratif car il a été employé à de multiples reprises par Le Pen père. Dans sa bouche, le mot "européisme" a tout son sens car, si l’on en croit la définition donnée par Wikipédia, il fait référence à une Europe fédérale et laïque alors que l’extrême droite voit l’Europe comme une Europe des nations...et catholique. Or, que je sache, l’Europe n’est absolument pas fédérale pour l’instant. On ne peut donc pas dire que le PS est acquis à l’européisme puisque pour l’instant, il défend une Europe des nations. Par contre, on peut dire qu’il défend, majoritairement, une Europe libérale, il l’a accompagné.
Pourquoi j’insiste sur ce point ? Parce que personne ne se dit anti-européen (à part peut-être le FN, et encore) mais que tout le monde tire sur l’Europe. Or, il faut savoir sur quoi on tire quand on tire sur l’Europe. On tire sur son fonctionnement anti-démocratique et sur son orientation uniquement (ou principalement) économique, et sur l’orientation très libérale de cette économie. Tirer sur l’Europe, sur l’entité Europe, c’est un peu comme si on tirait sur la France du fin fond du Berry en parlant de francisisme (oui, moi aussi je peux inventer des mots) qui serait la cause de tous nos maux. Non, notre vrai problème, c’est la politique menée par la France comme c’est la cas pour l’Europe. L’Europe ayant un handicap supplémentaire, sa jeunesse et ses bases institutionnelles (les différents traités) pour le moins discutable.


Le pire n’est (presque) jamais certain - Mister K - 12 mai 2011 à  10:44

Je me corrige :

Il y a certes une aile libérale au PS, mais elle est pas, a priori, minoritaire.

Je voulais dire : Il y a certes une aile libérale au PS, mais elle est, a priori, minoritaire.
Ce sera plus clair ;-)

Répondre à ce message #32314 | Répond au message #32313
Le pire n’est (presque) jamais certain - B. Javerliat - 12 mai 2011 à  11:09

Parce que personne ne se dit anti-européen

Si, je le dis : je suis anti-européen. Tout du moins celle qui existe.

Répondre à ce message #32316 | Répond au message #32313
Le pire n’est (presque) jamais certain - Mister K - 12 mai 2011 à  11:18

Si, je le dis : je suis anti-européen. Tout du moins celle qui existe.

Ben oui, mais tout est dans « Tout du moins celle qui existe ». Et cet avis est largement majoritaire en France, voir en Europe. Pour le dire autrement, tout le monde (ou presque) est pour la construction européenne (parce qu’on est en pleine construction...) mais pas telle qu’elle se fait. Mais personne n’est réellement pro-européen tout court, cela n’a pas plus de sens qu’être anti-européen tout court.

Répondre à ce message #32317 | Répond au message #32316
Le pire n’est (presque) jamais certain - 12 mai 2011 à  12:01

Bonjour

 Sur le fond de l’article, il est évident que le PS cherche à travers la commémoration du 10 mai, à exploiter un événement historique pour se donner une légitimité politique à l’approche d’échéances électorales majeures. Comme 1981 a représenté une rupture, 2012 en représenterait une, si le PS revenait aux affaires. Opération passablement malhonnête, car elle fait bon marché de la période 83-92, qui signe la conversion de la gauche française à l’économie de marché comme horizon indépassable (alors que Mitterrand promettait une transition du capitalisme vers le socialisme), les années fric (mettre un Bernard Tapie ministre, fallait quand même le faire !) et bien sûr la conversion, l’orientation pro-européenne de Mitterrand.
 Sur ce dernier point, les choses sont à la fois complexes et simples. Il est évident de Mitterrand l’européen est un homme de la 4ème République, marqué par les conflits mondiaux qui se sont déroulés sur le sol européen. C’est dans cet horizon qu’il pense la construction européenne. La poignée de mains à Kohl à Verdun en est le symbole le plus éminent. Dans cette optique, comment pourrions nous ne pas être européens ? A tel point que la construction européenne n’a commencé à faire problème, pour les opinions publiques, qu’après la chute du mur. Là il y a une nouvelle donne. La victoire des US sur l’empire soviétique (même froide, il s’agissait d’une guerre) signifie l’entrée dans la mondialisation capitaliste, avec une nouvelle mue du capitalisme ("financiarisation" de l’économie) ; à ce moment l’Europe n’est plus un simple projet de coopération et de pacification des peuples, elle devient une arme pour normaliser les politiques hétérogènes d’Etats comme la France et les conformer au modèle unique, capitaliste et libéral, imposé par l’Empire.
Alors, l’européisme pose un problème de terminologie. Peut-être. Mais tous les mots sont à double sens, ambivalents, peu précis. Nation ne connote pas forcément nationalisme. Défendre les Etats-Nations, c’est défendre la capacité politique des peuples. La nation, c’est le nationalisme, certainement. Mais c’est aussi l’internationalisme. On doit donc tenir et la construction européenne, et la défense de l’Etat Nation. La construction européenne parce que nous avons une histoire, une culture, une géographie et des intérêts communs. L’Etat Nation parce c’est le cadre naturel d’une capacité politique. A le nier, on laisse la voie libre à la démagogie et à la xénophobie du FN.
En clair, on ne pourra porter des coups décisifs au FN que lorsqu’on aura repéré ce qui fait la raison de son succès. Oui à l’Europe sans européisme (au sens d’un projet qui vise à ôter leurs capacités politiques aux peuples), et oui à la Nation sans nationalisme. C’est la très vieille idée de République. Philosophiquement, ça implique de repenser les rapports du particulier à l’universel. J’aime beaucoup la formule de JC Michea, l’universel, c’est le local sans les murs. Le nationalisme élève des murs et des haines. L’internationalisme les renverse et vise la fraternité. Mais il n’organise pas la disparition du local, du particulier, de la différence.

Je prendrai un exemple pour finir. Ma région d’origine est l’Est de la France. Lors d’une visite à mes parents dernièrement, j’apprends en lisant la gazette locale qu’une entreprise de fromage hollandais vient d’acheter des terres, des vaches pour construire une entreprise fromagère et fabriquer du gouda en Franche Comté, pays fameux pour son fromage, et pas seulement la cancoillotte de H.F. Thiéfaine. Et bien je ne suis pas chauvin, et j’aime la Hollande et ses fromages. Je mange du fromage hollandais, quand je vais en Hollande. Quand je suis chez moi, je mange le fromage de chez moi, fabriqué par les fromagers locaux, avec les vaches qui paissent dans les prés de mon pays. Et donc ce projet me choque. Parce qu’au bout du compte, on va finir par fabriquer un fromage qui ne sera ni hollandais, ni franc-comtois, l’équivalent de ces choses dégoulinantes qui suintent de ces choses informes qu’on appelle des "hamburgers" ... et on aura perdu deux richesses culturelles. La coopération et l’échange ne peut pas signifier l’abolition des identités et la fusion dans l’indifférencié. D’ailleurs, c’est une évidence logique avant d’être une évidence politique. On échange à partir du moment où on a quelque chose à échanger. Si l’européisme signifie la victoire du Même, sous son modèle américain de préférence, alors non à l’européisme. Il est dommage que ce genre de vérité sorte de la bouche de Le Pen. Cela signifie simplement que le succès politique du FN n’est pas dû au hasard, mais découle d’un principe de réalité, que la gauche ferait bien de prendre en compte.

Car on peut quand même espérer qu’il n’y a pas à choisir entre la normalisation yankee et le bruit des bottes fasciste. Or ceux qui veulent imposer à tout prix la normalisation yankee pourrait bien être les vecteurs du renouveau fasciste, dans un mouvement dialectique bien compréhensible.

Répondre à ce message #32318 | Répond au message #32313
Le pire n’est (presque) jamais certain - bombix - 12 mai 2011 à  12:02

Je n’ai pas signé : bombix. Voilà, c’est fait.

Répondre à ce message #32320 | Répond au message #32318
Le pire n’est (presque) jamais certain - B. Javerliat - 12 mai 2011 à  12:36

Comme 1981 a représenté une rupture, 2012 en représenterait une, si le PS revenait aux affaires.

Absolument pas. Rien dans le programme du PS ne fait rupture. Tout au plus aurons nous un grand bourgeois cultivé à la place d’un nain inculte et agité.

Répondre à ce message #32321 | Répond au message #32318
Le pire n’est (presque) jamais certain - Mister K - 12 mai 2011 à  13:46

Si l’européisme signifie la victoire du Même, sous son modèle américain de préférence, alors non à l’européisme.

J’ai peur que l’on mélange un peu tout. L’Europe, la construction européenne est avant tout économique. Et c’est bien une des sources du problème d’ailleurs. Et donc si "même" il y a, c’est au niveau économique. Personne ne veut d’un "même" au niveau culturel (en admettant que ce soit possible !). Par contre souvent, la gauche (française au moins) rêve d’un "même" au niveau social (qui n’a jamais entendu d’un smic européen par exemple ?).

j’apprends en lisant la gazette locale qu’une entreprise de fromage hollandais vient d’acheter des terres, des vaches pour construire une entreprise fromagère et fabriquer du gouda en Franche Comté

Bon, déjà, est-ce que ce genre de choses est véritablement lié à l’Europe ? A mon avis non. Ensuite, ce qui est possible avec le Gouda (qui n’a pas d’appellation d’origine contrôlée) ne l’est pas avec tous les fromages. Par exemple, en France, on ne peut plus fabriquer de feta (du moins on ne peut plus l’appeler feta) . La feta est désormais fabriquée uniquement en Grèce au sein de l’union européenne. Et c’est grâce à l’Europe...

Je crois que là, globalement, on parle de mondialisation. Avec ou sans l’Europe, il y a et il y aura une mondialisation. Sauf qu’en France, la mondialisation c’est l’Europe. Enlevez l’Europe, il vous restera la mondialisation.

Répondre à ce message #32324 | Répond au message #32318
Le pire n’est (presque) jamais certain - bombix - 12 mai 2011 à  18:54

L’Europe, la construction européenne est avant tout économique.

Resterait à prouver que l’économique comme tel est distinct du politique. Marx écrit une Critique de l’économie politique pour montrer justement les ressorts politiques de l’économique comme tel.
En général, quand on a dit "c’est économique", on veut dire par là qu’il n’y a pas de choix. C’est économique = les règles du marché sont libérales = il faut construire l’Europe sur le modèle libéral. Il n’y a pas à se plier à ce dictat. On est dans le politique quand on décide. Il faut lutter contre la politique des choses, pour parler comme JC Milner.

Je crois que là, globalement, on parle de mondialisation.

Oui parfaitement. L’Europe est un outil de mise au pas des Etats-Nations pour imposer la mondialisation. Concept à bord flou, lui aussi.

Répondre à ce message #32328 | Répond au message #32324
Le pire n’est (presque) jamais certain - bombix - 12 mai 2011 à  20:31

La feta est une AOP. L’AOC est une invention française. L’AOP a été créée sur le modèle de l’AOC.
Sinon, mon gouda s’appelle des "fromagerolles" (un truc de leur invention). Ils en fabriquent même avec de la girofle ! Ils sont à tuer ces hollandais ! De la girofle dans le fromage, je vous jure ! ;-) Et ils font du bio ! Ils expliquent (repérez le nom du site ;-) ) : « Ils ont choisi la France pour s’installer car aux Pays-Bas la pression foncière est telle que les terrains sont jusqu’à 20 fois plus cher qu’ici. » Une forme de délocalisation quoi. Ces gens ont l’air sympathiques, c’est pas la question. Mais s’ils élèvent des montbéliardes, que ce soit pour faire du Comté nom de Dieu ! Et sans girofle dedans ! ;-)) Enfin est-ce que vous imaginez un berrichon se mettant dans la tête d’aller faire du Sancerre, ou se donnant pour tel, au pays du whisky ?

Sinon, dans le genre moins folklorique, il y a la lutte des Fralib contre Unilever. L’usine française sise près de Marseille fabriquait le fameux Thé de l’Eléphant de Lipton. Unilever, le propriétaire, a décidé de délocaliser la production ... dans quatre autres sites européens, dont la Roumanie. C’est le jeu de la mondialisation au niveau européen. Mais on n’est pas obligé d’accepter ce jeu-là. Comme on n’est pas obligé d’accepter la privatisation de EDF/GDF, la privatisation du secteur bancaire, la privatisation de la Poste, la libéralisation des chemins de fer, etc. etc. Toutes choses qui sont imposées par les règles de fonctionnement de l’actuelle Europe.

Répondre à ce message #32330 | Répond au message #32324
Le pire n’est (presque) jamais certain - B. Javerliat - 12 mai 2011 à  12:01

Or, que je sache, l’Europe n’est absolument pas fédérale pour l’instant.

Sur le papier, elle n’est pas fédérale. Dans la pratique si. Les Etats n’ont plus aucune latitude politique, les Parlements des Etats consacrant les 3/4 de leur temps à transposer (que le terme est choisi) des directives européennes. Ces directives s’imposent aux Etats membres, dont les parlements ne sont pas consultés sauf pour les modalités d’application. L’Europe actuelle est donc une autorité supranationale, caractéristique principale d’une Europe Fédérale. La dernière injonction européenne oblige même les Etats à soumettre leur budget à l’Europe avant de les débattre en Parlement !

De plus, l’Europe a un fonctionnement parfaitement antidémocratique. Les lois sont edictées par la seule Commission Européenne composée d’individus non élus. Pire, le Parlement Européen n’a aucun pouvoir d’édicter les lois (c’est du ressort exclusif de la Commission) et n’est là que pour amuser la galerie et donner une apparence de démocratie. Il n’est qu’une chambre d’enregistrement des décisions de la Commission. Et encore, certaines décisions ne lui sont même pas soumises ! L’Europe est soumise à un régime autoritaire. Et je pèse mes mots.

Répondre à ce message #32319 | Répond au message #32313
Le pire n’est (presque) jamais certain - Mister K - 12 mai 2011 à  13:18

Les Etats n’ont plus aucune latitude politique

Euh, faut quand même pas abuser. Peut-être que de nombreux députés veulent faire croire cela pour se dédouaner, mais c’est archi-faux !

les Parlements des Etats consacrant les 3/4 de leur temps à transposer (que le terme est choisi) des directives européennes.

D’où sortent ces chiffres ? 3/4 du temps, je n’y crois pas trop comme ça...

L’Europe actuelle est donc une autorité supranationale

Cela aussi c’est faux. Ne pas oublier que nos chefs d’états, nos ministres, nos commissaires participent à l’Europe et ont plus de pouvoir souvent que le parlement européen. Et tous ces braves gens sont élus au niveau des états (sauf les commissaires qui sont nommés...). Je partage l’idée que l’Europe telle qu’elle existe n’est pas très démocratique. Mais nos représentants français décident au niveau européen aussi...il ne faut surtout pas l’oublier, puisque c’est d’ailleurs par leur légitimité née de leur élection en 2007 en France qu’ils (Sarkozy, Fillon) ont justifié le caractère démocratique de l’oubli du rejet du TCE en 2005 et l’adoption du traité de Lisbonne. Donc, on ne peut pas réellement parler d’autorité supranationale, surtout que la France a un poids non négligeable en Europe et est souvent à l’initiative de proposition et directives européennes.

Je pense franchement que nos élus français se servent bien souvent de l’Europe pour justifier leurs saloperies et qu’ils prennent les français pour des jambons. Mais nous ne sommes pas obligés de nous laisser faire...

Répondre à ce message #32323 | Répond au message #32319
Le pire n’est (presque) jamais certain - bombix - 12 mai 2011 à  18:32

D’où sortent ces chiffres ? 3/4 du temps, je n’y crois pas trop comme ça...

Dans "Une europe fort peu démocratique", Bernard Cassen avançait : « 75% des lois votées par le parlement français sont la transposition législative de directives mises en oeuvre par les institutions européennes. » On peut espérer que le directeur du Monde Diplomatique ne parle pas à la légère.

Ce simple fait est anticonstitutionnel. Dans la République Française, le seul peuple est souverain. "Le principe de toute Souveraineté réside essentiellement dans la nation. Nul corps, nul individu ne peut exercer d’autorité qui n’en émane expressément." D’où le divorce entre la représentation politique — que d’aucuns nomment une oligarchie — et la masse des gens, qui se manifeste par une abstention de plus en plus forte aux élections. D’ailleurs, aux élections, quand le peuple vote mal, on fait passer les textes par une autre voie. Le Traité de Lisbonne a ratifié, via les parlementaires (dont des socialistes), un texte (plus exactement son clone) rejeté par référendum en 2005. Peut-on imaginer une manoeuvre plus antidémocratique ?

La conférence de Cassen, à écouter ou réécouter sur l’Agitateur.

Répondre à ce message #32327 | Répond au message #32323
Le pire n’est (presque) jamais certain - Mister K - 12 mai 2011 à  20:15

Dans "Une europe fort peu démocratique", Bernard Cassen avançait : « 75% des lois votées par le parlement français sont la transposition législative de directives mises en oeuvre par les institutions européennes. » On peut espérer que le directeur du Monde Diplomatique ne parle pas à la légère.

Ouai...c’est un argument d’autorité ou de statut. Ce chiffre devrait être facilement vérifiable et le fait que Bernard Cassen le brandisse n’en fait pas une vérité. En fait, j’ai même trouvé une affirmation de 80% sur le site Front du front de Gauche. A force de recherche, j’ai quand même trouvé un CR de conférence qui remet en cause ce qui pourrait être un mythe, mythe utilisé par les anti-européens. Voici un extrait :

Outre ces évolutions générales, l’ensemble des intervenants ont été amenés à évoquer
une problématique plus précise : celle de la proportion de lois votées par les Parlements
nationaux sous l’influence de la législation européenne. Derrière cette question, on trouve en
réalité ce que tous ont appelé le « mythe Delors » : l’idée, attribuée à Jacques Delors et
largement répandue, selon laquelle 80 % des lois votées par le Parlement français seraient en
réalité des transpositions de directives européennes. Revenant sur l’histoire de cette idée, l’un
des intervenants a montré qu’elle était totalement infondée. La phrase trouve en fait son origine
dans une déclaration de Jacques Delors, lequel estimait en 1988 que « dans 10 ans, 70 à 80%
de la législation adoptée le sera sous influence européenne ». Mais elle a par la suite été
détournée et rendue célèbre par certains eurosceptiques, notamment Philippe de Villiers, selon
qui « 80% de la législation française est la transposition du droit européen » – sous-entendant
par là que l’Union aurait de fait aboli la souveraineté nationale. Les journalistes eux-mêmes
auraient contribué à diffuser ce mythe lors de chaque élection européenne, en l’utilisant comme
un argument susceptible de stimuler la participation électorale (« il est nécessaire d’aller voter
car l’Europe est à l’origine de 80% de notre propre législation »).

Avec un peu plus loin :

L’ensemble des intervenants se sont accordés à considérer que cette projection se
révélait aujourd’hui largement surestimée, ce que le chercheur Olivier Costa a été en mesure de
confirmer, en présentant les résultats d’une étude cosignée par les politologues Eric Kerrouche
et Sylvain Brouard. Il y apparaît que, en France, entre 1986 et 2007, seules 19% des lois
seraient issues d’une « impulsion européenne ». Ce chiffre a été longuement discuté lors du
séminaire, certains participants estimant que les indicateurs retenus pourraient se révéler en
partie restrictifs. Néanmoins, l’ensemble des participants ont considéré que les conclusions de
cette étude étaient conformes à leurs propres observations. Le mythe d’une Union européenne
ayant aboli de facto les souverainetés nationales se trouve ainsi clairement réfuté.

Bon, intuitivement, le chiffre de 19% (ce qui est déjà beaucoup) me parait quand même plus réaliste que 80%.
Après, on serait en droit d’avoir un suivi de cette statistique par le parlement...histoire de couper court aux rumeurs.

Répondre à ce message #32329 | Répond au message #32327
Le pire n’est (presque) jamais certain - bombix - 12 mai 2011 à  20:40

Bon, Brouard, CEVIPOF et Cie, c’est pt être pas parole d’Evangile non plus. Ceci dit, je te donne raison sur un point : il faut vérifier. Il faut toujours vérifier. Parfois, ce n’est pas si facile.

Répondre à ce message #32331 | Répond au message #32329
Le pire n’est pas l’Europe - Cyrano - 14 mai 2011 à  19:06

L’association de consommateurs "Que Choisir ?" a présenté en début d’année une étude sur le prix des pièces détachées dans l’automobile. En 8 ans, en France, ces prix ont augmenté de 29%. Le prix d’une aile avant de marque Renault peut coûter plus du double que dans un pays européen limitrophe. Ce racket est possible car en France, les constructeurs automobiles ont un monopole : ils sont les seuls à pouvoir vendre les pièces détachées de leur marque.
Pourtant... le Parlement Européen avait bel et bien voté en 2007 : les constructeurs automobiles n’avaient plus le droit de pratiquer ce monopole. Mais, tss, tss, les constructeurs français ont demandé au gouvernement de zapper cette mesure. Elle n’est donc pas appliquée, sans autre forme de procès.
Et alors ? Alors rien.

C’est un pur fantasme de gloser sur une Europe qui serait à l’origine de nos maux, qui serait une autorité au-dessus des pays la constituant. Les gouvernements ont toute latitude pour "transposer" les textes européens, ou les transposer en rien. Il faut laisser le FN tonitruer avec les slogans nationalistes, ça ne résiste pas au réel - le PCF aussi les a employés : l’Europe par-ci... l’Europe par-là... A croire que nos patrons, nos banquiers, nos ministres, sans l’Europe seraient des anges.

Répondre à ce message #32350 | Répond au message #32331
Le pire n’est pas l’Europe - bombix - 15 mai 2011 à  10:42

Ce n’est pas parce que les patrons violent les règles du libéralisme qu’ils feignent par ailleurs de respecter et que pourtant ils imposent — par les législations européennes singulièrement — que l’Europe est devenue innocente comme par magie. L’Europe n’est pas l’arbre qui cache la forêt. Elle est bien un dispositif pour mettre au pas les peuples et les Etats-Nations dans la nouvelle distribution des cartes après l’effondrement de l’ex-URSS et l’essor de ce que l’on a nommé "la mondialisation".
Presque toutes les réformes libérales se sont faites en France au nom de l’Europe. Revoir à ce sujet l’emblématique directive Bolkestein.

Mais pour que les choses soient plus claires, il faudrait peut-être parler de l’Europe libérale de Maastricht, et non pas de l’Europe tout simplement.

Et pour ce qui est du libéralisme des libéraux au pouvoir, on a bien vu pendant la crise de 2008 soudainement les Etats — si vilipendés pour leur immobilisme et leurs archaïsmes — monter au créneau pour sauver les banques. Car si les bénéfices sont privés, les déficits seront publics. Logique. Pas trop s’occuper des mots. Plutôt regarder ce qu’ils font, nos libéraux. Y compris avec les institutions européennes.

Répondre à ce message #32357 | Répond au message #32350