C’est la lutte finale - 2
Mais arrêtons de casser du socialiste, inutile de tirer sur un corbillard. Le véritable ennemi, c’est les “marchés”, c’est à dire l’oligarchie financière [1]. Et les représentants des “marchés”, ou leurs nervis, plutôt, c’est la droite. Il est commun de dire que la situation que nous vivons a pour cause la perte d’influence des gouvernements sur l’économie, que les marchés ont pris le pas sur le politique. Erreur ! La crise que nous vivons n’est pas une fatalité divine ou un “excès” du capitalisme, mais un projet sciemment organisé. Les “marchés”, pour fonctionner, ont besoin d’un État à la fois minimal et fort. Minimal, pour qu’un minimum de lois vienne entraver leur route, et fort pour faire respecter leurs règles et faire taire ceux qui en subissent les conséquences. Un État idéal pour les “marchés” se réduit à la Justice, la Police et l’Armée. Tout le reste relève pour eux de la gestion privée, jusqu’à l’École, la Santé, le Social, etc. Enfin tout ce qui représente des sommes colossales qui échappent encore aux “marchés”.
Un État idéal pour les “marchés” se réduit à la Justice, la Police et l’Armée
La Justice pour faire respecter leurs règles, la Police pour faire taire ceux qui ne sont pas d’accord, et l’Armée quand ça devient trop le bordel. La fusion, en 2009 de la police (ministère de l’intérieur) et de la gendarmerie (ministère de la défense) est révélatrice. Il ne s’agit ni plus ni moins – sous couvert d’économies budgétaires – de donner aux forces de sécurité intérieure les moyens des forces de sécurité extérieure. Et si on se donne les moyens, c’est bien pour en faire quelque chose, non ? [2]. L’idéal des “marchés” est un état autoritaire. Face aux désastres qu’ils génèrent, seule la force – qu’ils s’arrangent pour rendre légitime par la loi “votée” par leurs affidés – peut les contenir. Légalisation de la force de coercition d’autant plus facile à réaliser, que les “marchés” en sont maintenant arrivés à prendre le pouvoir dans les pays européens par des coups d’Etat.
Plus personne ne réagit à un putsch aux portes du pays
Ce qui s’est passé en Italie et en Grèce est proprement incroyable. C’est ici, dans la vieille Europe, que les “marchés” ont expérimenté avec succès le “coup d’État financier”. Il y a maintenant en Europe, deux pays qui sont dirigés par des gens que le peuple n’a pas élu. C’est bien l’une des caractéristiques des États autoritaires, non ? Non seulement ils n’ont pas été élus, mais ils ont tous pouvoirs et n’ont aucun compte à rendre aux Parlements. La dictature est de retour en Europe, et personne ne s’en émeut ! Les ravages du capitalisme dans les esprits sont tels que plus personne ne réagit à un putsch aux portes du pays ! Plus grave, comme en Espagne, les gens en arrivent à préférer donner les clés du pays à ceux qui vont les piller en votant pour eux, plutôt que de se les faire voler [3]. Il doit être moins angoissant de se jeter soi-même dans le précipice que d’y être poussé, sans doute…
Un futur inacceptable mais pourtant hautement probable
En France, le pillage promet d’être gigantesque. Les privatisations [4] - spoliation du bien public au profit du privé - ont déjà rapporté des centaines de milliards aux “marchés”, et appauvri les Français d’autant. Mais c’est de la roupie de sansonnet à côté du pactole qu’ils s’apprêtent à rafler : l’éducation et ses 65 milliards [5], la santé et ses 400 milliards [6], la retraite et ses 300 milliards [7], et tout ça chaque année. Le magot est énorme, et les conséquences terribles. Écoles privées pour riches, écoles publiques sans moyens pour les autres. Cliniques privées pour les riches, dispensaires pour les autres. Plus de retraites pour personne. Mais quand on est riche, ça n’est pas un problème, on a de quoi voir venir… C’est un futur inacceptable mais, sans réaction de notre part, pourtant hautement probable !
Les “marchés” s’apprêtent à lancer l’assaut final
Les fondations de l’organisation sociale française, où chacun participe selon ses moyens mais reçoit selon ses besoins, sont déjà bien sapées par des décennies de politiques de droites ou social-démocrates. C’est le seul système qui garantisse la cohésion sociale et qui limite les inégalités dans des proportions acceptables. Les “marchés” s’apprêtent à lancer l’assaut final. Pour connaitre ce qui nous attend, il suffit de regarder ce qui se passe ne Grèce [8]. La reconduction de Sarkozy - perspective la plus terrible mais aussi la plus probable - ou l’élection de Hollande en seraient le feu vert. Allons-nous renoncer sans combattre ? Allons nous perdre la lutte finale ?
[1] Regarder C’est Standard & Poors qui dirige le monde - BBC, 26 sept 2011 - 3’30" - Sous-titré
[2] Comment ça, c’est exagéré ? N’a-t-on pas instauré ici, en France, pas plus tard que lors des émeutes de 2005, un couvre-feu ? A la suite, Sarkozy n’a-t-il pas créé le “Conseil de défense et de sécurité nationale”, sorte de Pentagone à la française, dirigé par lui seul, et où le Parlement n’a aucun moyen de lui demander des comptes ? Lire cet article pour en savoir plus.
[3] Lire Élections en Espagne
[4] Lire Les privatisations en France
[5] Lire Le système éducatif français
[7] Lire La sécurité sociale en France