EDITORIAL OCTOBRE 1999

Ce n’est pas rigolo de tirer sur les animaux morts.

vendredi 1er octobre 1999 à 00:00, par Charles-Henry Sadien

En relisant dernièrement mes vieux Agitateurs ainsi que mes bafouilles publiées dans des canards « sérieux », j’ai pris conscience d’un mal grave qui me ronge, mais que j’ai la plus grande peine à définir. Je ne sais pas en effet si j’aime détester, ou si je déteste aimer.

Il m’est arrivé à plusieurs reprises, dans ces colonnes ou ailleurs d’écrire qu’un disque, un livre ou un film ou autre chose, était mauvais, parce que trop rectiligne, trop « propre », trop parfait, et donc sans âme, superficiel et patati et patata.

Après coup, c’est sûr, je culpabilise. J’imagine le brave type, écrivain, musicien ou cinéaste, qui a travaillé honnêtement et avec acharnement pour présenter sa création, et qui va lire dans un canard un article rédigé par un gars bien planqué derrière sa feuille de papier, expliquant à des milliers de lecteurs que son oeuvre manque, par exemple de spontanéité.

Chroniqueur est finalement un boulot au moins aussi peu recommandable que pompe funèbre, militaire, ou ouvrier dans une usine de fabrication d’armes. Oui, mais ça rapporte pas mal. Alors, je me promet de n’écrire que sur les choses que j’aime. Oui mais voilà : à force d’être toujours élogieux voire dithyrambique, les écrits perdent de leur valeur. Le lecteur regarde la signature et se dit : « ah, oui ! C’est écrit par ce type qui trouve tout formidable, donc, s’il trouve ce bouquin génial, ça ne veut rien dire ».

Et puis, il faut bien l’avouer ; tous les critiques honnêtes vous le diront : c’est tellement plus rigolo de dire du mal ! Un vrai boulot de psychopathe ! Vous pouvez me croire !

Il y a pourtant une manière encore bien moins engageante
et courageuse de procéder qui ne laisse que peu de place aux états d’âme du rédacteur. Cela consiste à ne torpiller que les choses indiscutablement mauvaises, réalisées à des fins pécuniaires, pour « faire un coup médiatique », ou pour d’autres raisons malsaines : le livre sur Jacques Coeur de Serge Lepeltier, le dernier disque de Patricia Kaas ou d’un boys band, le dernier nanar avec Julia Roberts, par exemple. On tombe alors avec délice dans une facilité jubilatoire en usant des formules les plus assassines sans le moindre remord. Mais le plaisir ne dure généralement pas bien longtemps. Ce n’est pas rigolo de tirer sur des animaux morts.

Mais il faudrait tout de même « éduquer » le lecteur : un article élogieux sur le dernier film de Christian Clavier dans Paris Match, ne vaudra jamais une chronique, même mitigée, sur le dernier film de Kubrick dans Les Inrockuptibles. Et si un jour vous lisez dans Jeune et Jolie que le soixante quinzième album de PJ Harvey est un chef d’oeuvre, fuyez le comme la peste, car cela signifiera alors pour toute personne ayant un minimum de sensibilité, que cette belle vampe s’est transformée en Dorothée « sans les couettes » et qu’elle produit une musique de colonie de vacances pour enfants gâtés.

Je crois que finalement, je vais m’inventer un nouveau métier : chroniqueur de chroniques. Il y a bien des pirateurs qui conçoivent des virus et se font embaucher par des entreprises d’informatique pour réaliser des programmes de détection de ces mêmes virus, et sécuriser les systèmes informatiques ! Les flics ne sont-ils pas eux aussi, dans leur immense majorité d’anciens délinquants qui ont décidé un jour de devenir des « voyous protégés par la loi » ? La bonne affaire !

commentaires
Ce n’est pas rigolo de tirer sur les animaux morts. - 10 février 2007 à 18:22

tait toooooiiiii
tu es bon qua ca de toute facon !!!
Au faite ta femme te trompe
...
Avec qui ?...
Bah moi !!! ==> Amicalement Bill Gates


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