Quel avenir pour la presse en ligne ?

1ère PARTIE : état des lieux
mardi 1er mai 2001 à 00:00, par Charles-Henry Sadien

Mondialisation ! Le mot est lancé. La presse, confrontée à une crise sévère n’y échappera pas. Son eldorado : le réseau des réseaux, les nouvelles technologies de l’information et de la communication, le web... l’internet, quoi ! Tous les grands patrons de presse s’y préparent, testent différentes formules miracles, et se persuadent que l’internet deviendra un mode de communication majeur de l’information de demain. Au regard de ce qui se passe actuellement, à quoi ressembleront nos journaux électroniques dans quelques années ? Comment fonctionneront-ils ? Comment s’en servira-t-on ? Suivez le guide...rnrn

LE DECLIN DU PAPIER. Depuis de nombreuses années, la presse écrite est en crise. En France, le nombre de périodiques, qu’ils soient quotidiens, hebdomadaires ou mensuels, ne cesse de diminuer. Les journalistes font partie de ceux qui sont les plus touchés par le chômage. Le coût du papier, lui, ne cesse d’augmenter. C’est le cas également pour les frais de distribution qui représentent en France près de 40% du prix moyen au numéro, ce qui correspond à l’un des taux les plus élevés d’Europe avec la Suisse (45%) selon l’Association Mondiale des Journaux.

Dans un contexte économique difficile, la généralisation de l’accès à internet aurait pu fragiliser davantage encore la presse écrite qui subit une baisse d’attractivité auprès des annonceurs publicitaires au profit de la télévision et de la radio et bientôt du web. Au lieu de cela, les patrons de presse ont eu l’intelligence de se tourner vers le web pour mieux rebondir. Considéré au début comme un gadget " pour l’image moderne de l’entreprise ", comme on le constate sur le site du réseau Centre-France / La Montagne, le support internet a rapidement été perçu comme le complément parfait du support papier pour offrir un service supplémentaire aux lecteurs. Cela confirme au moins une chose : un nouveau média n’en supprime pas un autre, plus ancien. Il le complète et permet son enrichissement. L’immense majorité des titres en ligne, proviennent en effet d’une adaptation web de grands médias existants dans la presse écrite traditionnelle.

Les quelques nouveaux médias français exclusivement disponibles sur le web, se sont vite rendu compte qu’ils ne pouvaient concurrencer sérieusement l’expérience et les moyens de grands groupes de presse. Ils se sont donc immédiatement positionnés sur le créneau d’une " information pratique ", avec un contenu rédactionnel relativement réduit mais avec le développement de nombreux services aux internautes à l’image de ce qui est fait par le réseau Webcity.

QUANTITE OU QUALITE ? Si dans un premier temps la presse écrite semble s’être adapté plus facilement au nouveau format du web que la presse radiophonique et la presse télé, ce n’est plus tout à fait vrai aujourd’hui. Car même si en raison d’une technologie pas encore très au point, la télévision demeure en retrait, on constate par ailleurs que le milieu de la radio a non seulement rattrapé son retard, mais s’est aussi ouvert de nouvelles et brillantes perspectives d’évolution.

Il faut dire aussi que depuis ses premiers balbutiements sur le web au milieu des années 90, l’utilisation de l’internet par la presse " papier " a relativement peu évolué. L’engouement des grands groupes de presse écrite a certes été immédiat - même en l’absence de rentabilité immédiate - mais l’utilisation qui a été faite du web n’a pas toujours été très réfléchie.

Au départ, il s’agissait essentiellement de transposer la version papier sur le web avec un système d’archivage. L’accumulation de données encyclopédiques plus ou moins périssables ont vite démontrées leurs limites. Les lecteurs habituels de la version papier ne voyaient pas l’intérêt de consulter leur journal en ligne. Quant aux autres, ils restaient plus attachés à ce qui était palpable - le papier - qu’à ce qui était virtuel. Pourtant, de nombreux journaux en ligne fonctionnent encore en grande partie de cette façon (liberation.fr).

On observe aujourd’hui quelques timides tentatives pour rendre l’information plus interactive. Cela passe essentiellement par la création de forums de discussions, et la venue d’invités qui répondent en direct aux questions des internautes avec parfois la mise en place de webcams - comble du luxe ! Mais d’une manière générale, les capacités multimédia et interactives du web sont largement sous exploitées.

Cependant, les choses évoluent. De plus en plus de journaux disposent en effet d’une rédaction indépendante pour gérer leur site web. Cela permet une actualisation très fréquente (plusieurs fois par jour), et, dans des cas plus rares, la mise en ligne d’article exclusivement disponibles sur le web.

En revanche, on remarque qu’il existe très peu de cas dans lesquels la version web constitue le support principal et où la version papier est considérée comme le support complémentaire. Si le magazine Transfert.net a adopté ce mode de fonctionnement, la majorité des titres français hésitent encore à balancer des articles sur le web avant qu’ils soient publiés dans la version papier.

Cette forte résistance tient au fait que les responsables de presse craignent que le web fasse de l’ombre au support papier et le rende inutile...même si, en considérant le faible taux d’équipement des ménages, il apparaît que cette crainte soit très " avant-gardiste " !

Certains journaux comme La Nouvelle République, ou Le Monde ont créés des sites payants par abonnement, avec des fortunes diverses. Le principe de la gratuité étant de mise sur le web, il est très facile de trouver sur le net les informations que l’on recherche sans avoir à passer par un site payant.

D’autres ont trouvé la parade : ils divulguent de gros scoops sur leurs sites mais renvoient aux kiosques pour la lecture du dossier complet. L’objectif avoué est de mettre l’eau à la bouche des internautes pour doper les ventes de la version papier. Et ça marche.

LE RETOUR DES RADIOS LIBRES. La situation est assez différente pour la presse radio et la presse télé. Certes, on observe le même phénomène de transposition pour les grandes radios (écoute en direct via internet), tandis que pour les chaînes de télévision, le web est une vitrine promotionnelle pour " vendre ses programme " et organiser des jeux avec les internautes.

Mais ce qui est le plus intéressant, c’est la naissance de nouvelles radios et de télévisions indépendantes. Avec la colonisation du réseau hertzien par de grands groupes de radios commerciales, les " vraies " radios locales libres ont peu à peu disparues. Le web a favorisé leur résurrection à la faveur de faibles coûts de mise en place.

Dans une moindre mesure, les " web télé " se développent également à grande vitesse, avec une prise de conscience plus politique et revendicative. Sous l’influence de l’Organisation Permanente des Médias Libres et de télévisions associatives indépendantes (Zalea TV, Sans Canal Fixe, L’oeil Electrique...), le développement de ces télévisions s’accompagnent d’une forte demande pour contester le monopole des télévisions commerciales (TF1, France 2 etc.) et l’ouverture vers les télés associatives et de quartiers avec l’organisations de colloques comme celui des Etats Généraux du Tiers Secteur Audiovisuel à Tours (26 et 27 mai). Cet engouement est fortement freiné par les techniques actuelles de retransmission vidéo qui ne sont pas au point (débit trop faible, images minuscules et saccadées...)

commentaires
Questions - corentin33 - 23 février 2005 à 19:48

Bonjour,

vous parlez lapidairement de la presse exclusivement on-line. J’ai un grand nombre de questions concernant le domaine, je ne sais pas si vous avez quelques réponses... Sait-on si elle a un avenir, grâce au montant des pubs qui augmenteraient ? A-t-on aujourd’hui les moyens de chiffrer ce que rapporte la publicité sur le web ? Est il viable de lancer aujourd’hui un magazine uniquement "on line" et de s’appuyer sur les seuls revenus publicitaires ? Dans le cas contraire, sera-t-il viable de lancer un tel site dans quelques années ? Google, avec son système Adsense / Adword , est il en passe de devenir la plus grosse agence de pub au monde ?
Cela fait beaucoup de questions, mais si vous pouvez m’éclairer, par le biais d’un contact ou d’un avis, sur l’une ou plusieurs de ces questions, j’en serais très heureux.
Merci d’avance,


#1913