EDITORIAL MAI 2005

Oui, mais non.

dimanche 1er mai 2005 à 00:00, par Mister K

L’Europe. On peut dire, sans prendre trop de risques, que la trés grande majorité des français est favorable à la construction européenne. Mais attention, je parle de l’Europe et pas de l’Union Européenne. Parce que là, au contraire, ils sont trés critiques, et il y a sûrement de quoi. Le problème, c’est que le 29 Mai 2005, on nous proposera d’appouver ou non un "Traité établissant une Constitution pour l’Europe". Le titre même de ce traité comporte une manipulation. Il s’agit de la première raison de dire "Non".

Un titre à l’image du texte : imprécis.

Vous allez dire que je pinaille. Mais dès le Titre 1 de la partie 1 de ce texte, on vous parle de "Définition et objectifs de l’Union" sous entendu "Union Européenne". Alors, pourquoi ne pas avoir nommé ce traité "Traité établissant une Constitution pour l’Union Européenne" ? Parce qu’il est plus difficile de dire non à l’Europe, que dire non à l’Union Européenne ? Sûrement. Mais aussi parce que ce texte, issu d’un consensus difficile à obtenir, est une somme d’imprécisions, un texte extrêmement interprétable. Le titre est à l’image du texte, ni plus ni moins. Et il fait actuellement le bonheur des partisans du oui et du non, qui peuvent interpréter facilement le texte selon leurs besoins. Et il fera, s’il est adopté, le bonheur des juristes, qui pourront s’étriper devant la cour européenne du justice. Il sera assez facile de prétendre qu’une loi est anti-constitutionnelle, et il ne sera pas plus difficile de défendre l’inverse. La cour européenne de justice, risque alors d’avoir un pouvoir assez important, puisque tout sera affaire d’appéciation plus ou moins arbitraire. Prenons un article au hasard, article qui présente d’ailleurs une amélioration pour la démocratie européenne, puisqu’il semble permettre à un million de citoyens européens de "proposer" une loi. Que dit cet article : « Des citoyens de l’Union, au nombre d’un million au moins, ressortissants d’un nombre significatif d’Etats membres, peuvent prendre l’initiative d’inviter la Commission, dans le cadre de ses attributions, à soumettre une proposition appropriée sur des questions pour lesquelles ces citoyens considèrent qu’un acte juridique de l’Union est nécessaire aux fins de l’application de la Constitution. » Alors, vous remarquerez que vous "n’obligez" pas la Commission, vous "l’invitez à soumettre une proposition", et surtout, les un million de citoyens doivent être issus "d’un nombre significatif d’Etats membres". Bref, est-ce que 999966 français et un membres de chacun des 24 autres pays de l’Union Européenne sont suffisants ? Vraisemblablement non. Mais en jouant les idiots, on peut facilement le comprendre comme cela.

Bref, si la constitution est adoptée par les 25 pays de l’Union, orientez-vous, vous ou vos enfants, vers le droit européen ! Il va y avoir du business à faire.

Le diable est dans le détail

Alors, on pourrait éplucher comme cela les 448 articles du texte. Mais à quoi bon, puisqu’on peut lui faire dire à peu près ce que l’on veut. Plutôt que de faire une analyse microscopique du texte, il est préférable d’en faire une analyse macro, d’en tirer l’esprit. Et pour cela, il faut commencer par se remémorer comment et pourquoi a été écrit ce texte. Le 12 Mai 2000 à Berlin, Joschka Fischer émet l’idée d’une Constitution Européenne, pour lui cette Europe doit être fédéraliste. Jacques Chirac, qui est pour une "Europe unie des états" reprend cette idée le 27 Juin 2000 en l’éloignant de l’idée fédéraliste. L’accord pour le traité de Nice est extrêmement difficile à obtenir, mais est signé malgré tout en Mars 2001. C’est suite à cela que les choses s’accélèrent. Fin 2001, une convention de 105 membres présidée par Valery Giscard d’Estaing est créée. Les travaux de la Convention Européenne durent jusqu’au 18 Juillet 2003. Le texte, après quelques ajouts et modifications, est finalement signé le 29 Octobre 2004 à Rome.
Bref, ce texte est l’aboutissement d’environ 3 ans de travail. 3 ans où sur chaque point, il a fallu trouver un consensus minimum. Au final, beaucoup de renoncements pour tout le monde. Tout cela pour passer du "marché commun" de 1957 au "marché intérieur où la concurrence est libre et non faussée" et où l’Union oeuvre pour, entre autre, "une économie sociale de marché hautement compétitive". Comme il a, semble-t-il, été impossible aux politiques, de se mettre d’accord sur une fiscalité commune, une politique sociale commune, des objectifs ont été mis en place afin de palier à cela à terme...mais en laissant faire la loi du marché. Car, il faudra expliquer comment on obtient une concurrence libre et non faussée avec des règles fiscales et sociales différentes...et même une politique monétaire différente, selon que votre pays dépend de la Banque Centrale Européenne ou non. Les gouvernements des états membres n’auront pas d’autres choix que d’uniformiser plus ou moins leurs politiques afin de permettre à leur pays de rester compétitifs dans le cadre de l’Union Européenne. On peut craindre le nivellement par le bas.

Une défaite des politiques

Ce texte est donc une défaite des politiques qui renoncent à avoir le contrôle sur les évènements et préfèrent le laisser faire. C’est un signe fort d’impuissance. C’est en ce sens que l’on peut juger ce traité de constitution comme d’inspiration libérale. On se laisse guider par les évènements, on navigue à vue, on ne prévoit rien, on joue les pompiers.

Soyons réalistes.

Malheureusement, que l’on dise Oui ou Non à ce texte ne changera pas grand-chose. Dans le premier cas, on suivra la voie toute tracée de la loi du marché... dans le second cas aussi.
On fait semblant de nous faire croire que notre décision, éminemment politique, est importante, alors qu’au fond, le marché économique est mondial et nous gouverne. Nous avons créé un monstre incontrôlable et immatériel... pour le bien matériel d’une minorité. Les politiques suivent ou palient aux effets les plus négatifs, point.

Alors que faire ? Résister, certes, mais comment ? Certains le feront en votant non. Ils misent sur le choc psychologique. Mais seuls les politiques pourront prendre en compte ce choc, et encore... Le marché s’en moquera. Mais au moins, c’est vrai, ça les fera chier. D’autres vont dire que si le non ne sert à rien, autant voter oui. Oui, mais non.

commentaires
> Oui, mais non. - Xavier - 1er mai 2005 à 21:39

Ni oui, ni non, je suis tout a fait d’accord avec toi, l’un et l’autre n’y feront rien...

J’ai personnellement de bonnes raisons de penser qu’il vaut mieux voter non, et j’en ai aussi d’aussi bonnes qui me permettraient de penser qu’il faut voter oui. forcément, dans 150 pages, ya de quoi prendre et de quoi laisser...

Apres il y a des raisons "strategiques" : si effectivement on vote oui, on donne carte blanche a 130 pages de reglementation archi précise sur le marché, et une 30aine de pages de bonnes volontés sur le "social" (sic).

Et si on vote non ?

Quel "non" sera "écouté" ?

Ce traité, il va etre renégocié ?

C’est sur ?

Et s’il est renégocié, c’est pour en faire quoi ?

Un manifeste social pour l’europe ? Moi j’y crois pas..

Le non a plusieurs couleurs, suivant les partis engagés..

Non au libéralisme, au capitalisme ?

Non a la Turquie,

Non a l’anti-monarchie, a l’immigration ?

...?

= oui au social, a l’altermondialisme ?

= oui a la "france souveraine", a l’"europe européenne" ?

= oui a quoi ?...

...

Mon non a des criteres précis. Mon oui aussi.

150 pages pour faire croire que l’on est responsables de notre destin...

Moi je voterais, mais je voterais blanc et puis c’est tout !

Amitiés..


#2114
> Oui ou NON ? avis d’un ado de 16 ans - Antoine - 28 mai 2005 à  21:44

bonjour à vous ,je suis un adolescent épris de justice, de liberté et de culture, je m’informe tout les jours sur l’actualité et au fur et à mesure de que je mûri, je me rends compte à quel point la société, la politique, l’économie, les relatiions internationales et tout le reste vont mal, et la premiére chose qui me vient à l’esprit en entendant parler de l’Europe, ou plutot de l’UNION €UROPÉ€NN€ c’est les délocalisations vers les pays de l’est, certes c’est trés objectif malgrés tout les autres motifs mais comment ferons les générations naissantes pour obtenir un emploi ? y a t-il une égalité entre le polonais pret à travailler pour 50 € et le Français pour le triple ?
Non franchement là c’est déloyale, et aussi par exemple la défense commune : mettre en commun les armées, oui mais si au sein de l’Union un conflit aparait ? fera t-on l’Otan Européene ? sincérement je ne sais pas où l’on va, si ce n’est quà notre perte, car là c’est bien la droite au pouvoir et il y a un sacré merdier, je prends un exemple parmis tant d’autres sur la loi Fion, pardon Fillon : abolition des libertés d’expression de la majorité lycéenne ( Fillon s’en fout lui : son fils est dans le privée ) et répression musclée par les forces de l’ordre, déja que le systeme éducatif est littéralement obsoléte si ce n’est pour dire pourri ( il y a de quoi etre rebelle ) ou aussi Sarkozy qui veut un systeme à l’ "Américaine", oui et tant qu’à faire l’Union Européenne laisse la place aux U.S.E ( United States of Europe ), voilà l’influence de l’american way of life en parie dévoilée, ici on est en Europe, sur le vieux continent, chaque nations est propre à la civilisation européenne qui est plusieur fois millénaire, les Etats-Unis se sont construits de maniéres différentes en peu de guerres, d’expériences politiques et en 250 ans alors pourquoi les imiter ici alors qu’au départ ce sont eux qui nous imitairent ? Aussi il y a les scandales sur les guerres " contre le terrorisme", pourquoi dire " guerre du Golfe " alors que c’est " guerre du pétrole " ? Et la montée en fléche de la Chine , ce péril jaune, qui deviendra la seule superpuissance mondiale, détronant les Pays de la triade : qui pourra encore rivaliser avec eux ? point de vue diplomatique , économique et aussi surtout militaire ?! Je crains autant les Chinois que les Américains, et je trouve les gouvernements français et américains autant pathétique l’un que l’autre, en parlant du gouvernement français : un lion qui imite un lion devient un singe , et là on est vraiment ds le ridicule, je ne peux pas exprimer tout ce que j’ai sur la conscience car c’est trop dire, vous n’avez qu’à me contacter si possible à mon adresse E-MAIL,

PS : autant etre dans un état totalitaire fasciste ou plutot nationaliste qui nous dévoile beaucoup et rends une suprématie à la nation plutot que dans un état de bourgeois , de menteur et de profiteur ( un état vendue aux chefs d’entreprises ? ) qui cache beaucoup pour conserver les priviléges de ces "politiques" ( dictateur ? Despote ? ... ) on est pas dans une république Oligarchique, on est dans une Démocratie, nous sommes la République Française qui a des valeurs à l’origine dignes et il faut se battre pour revenir dans un état où liberté, travail, égalité, et fraternité y soit dominants et où l’on pourrait vivre ensemble ou en autarcie ( mais ô combien efficace si possible)

#2208 | Répond au message #2114
> Oui ou NON ? avis d’un ado de 16 ans - Mister K - 28 mai 2005 à  23:09

Bonjour Antoine.

autant etre dans un état totalitaire fasciste ou plutot nationaliste qui nous dévoile beaucoup et rends une suprématie à la nation

Non, je n’ai pour l’instant jamais vécu dans un état totalitaire, et je n’ai pas envie d’esssayé. "La nation" est bien entendu, de nos jours, un leurre. Ceux qui la brandisse contre tous les malheurs du monde marchent a coté de leurs pompes et vivent dans une autre époque. Si ce n’est pas l’Europe telle qu’on la construit actuellement qui peut nous donner de l’espoir, ce n’est pas plus la France...

nous sommes la République Française qui a des valeurs à l’origine dignes et il faut se battre pour revenir dans un état où liberté, travail, égalité, et fraternité y soit dominants et où l’on pourrait vivre ensemble ou en autarcie ( mais ô combien efficace si possible)

Alors, ce qui m’étonne dans cette phrase, c’est le mot "travail" au milieu de liberté, égalité et fraternité. Je ne sais pas si vous travaillez ( à 16 ans, c’est théoriquement possible...), mais le monde du travail est bien loin de ce que l’on pourrait espérer. L’argent y est roi, et les hommes quantité négligeable. Les gens qui "s’épanouissent" dans leur travail ne sont pas nombreux...et ceux qui l’affirment bossent en général pour la thune. Votre raisonnement me fait vraiment peur. A 16 ans, on devrait avoir envie de voyager et découvrir le monde...et sûrement pas de vivre en autarcie.

Personnellement, je suis profondément européen. Il ne faut pas faire du référundum, un "Non" aux 10 pays (bientôt 12) qui viennent de rentrer dans l’union européenne. Ils ne sont pas responsables des délocalisations...délocalisations dont l’importance est vraisemblablement exagérée. Il ne faut pas jouer l’avenir des français contre l’avenir des polonais ou des roumains.

Je pense que si les gens qui ont rédigés cette constitution (et ceux qui sont pour le oui...) étaient réellement européens et croyaient réellement en l’Europe, ce texte serait nettement meilleur. La vérité est qu’ils n’y croient pas réellement. Ils pensent intérêt national contre intérêt national. Et donc cherchent les consensus. Consensus qui leur semble sur bien des points impossible (fiscalité, politique sociale etc.). L’Europe est alors bien loin. Ce texte est à la fois une démission des politiques qui refusent de peser su l’avenir, doubler d’un plébiscite pour les traités passés. A cela, je ne peux répondre que "Non", moi qui suis un véritable européen. Et qu’on ne vienne pas me dire que si j’étais vraiment européen, je dirai forcément oui ; c’est un peu comme si l’on disait que je ne suis pas français parce que je ne suis pas d’accord avec toutes les lois qui sont votées en france : ce raisonnement est stupide.

De plus, mon expérience concrète de la démocratie européenne m’a prouvée qu’elle ne fonctionne pas correctement, que l’europe est actuellement aux mains d’une élite qui pense avoir toutes les bonnes réponses à toutes les questions. Une élite dont il faut souligner qu’elle est beaucoup plus économique qu’intellectuelle ou politique. Je ne vois aucun changement de fond dans la constitution qu’on nous propose, et cela m’inquiète grandement.

Pour toutes ces raisons, je voterai "NON" à la constitution pour l’Union Européenne. Mais sans trop d’illusions sur les résultats que cela donnera. Juste un peu d’espoir. Que la participation dans les années à venir des européens à la rédaction d’une meilleure constitution puisse intervenir.

Mais en aucun cas, je voterai "NON" à l’Europe pour un "OUI" à la France. Le nationalisme à outrance est plus qu’une connerie, c’est un danger.

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