Archives

Souvenirs d’un camp nazi

mercredi 1er novembre 2000 à 00:00, par Nicolas Poupon

Il n’avait pas encore 18 ans que sa vie s’est arrêtée : déporté dans un camp nazi, Pierre Ferdonnet fait partie de ces résistants de la première heure qui n’ont jamais abdiqués ni ne sont planqués. Ancien maire adjoint sous la municipalité de Jacques Rimbault, continue aujourd’hui la résistance en intervenant régulièrement en milieu scolaire. Son mot d’ordre ? Ni haine, ni oubli. Rencontre.rnrn

Quelles ont été vos conditions d’arrestation ?

Pierre Ferdonnet : Nous avons été dénoncés et arrêtés pour avoir distribué des tracts appelant à la résistance. Nous avons été déportés et amenés aux " douches ". Cela consistait à nous mettre à nu des pieds à la tête et à remplacer nos vêtements par d’autres vêtements civils qui appartenaient à des gens qui avaient été envoyé dans un camp et passés au four crématoire. On nous a donné un pantalon, une chemise, une veste et des claquettes. Ensuite, on nous a tatoué un numéro sur le bras. C’est le seul camp qui procédait de la sorte. Dans les autres camps, c’est un morceau d’étoffe avec un numéro et un triangle rouge qui était cousu sur la veste. Dans le triangle, il y avait une lettre indiquant notre nationalité. Il faut dire que notre convoi était destiné au four crématoire.

Et ensuite ?

Pierre Ferdonnet : On est resté un bon mois à Birkeno. C’était un camp d’extermination composé de cinq fours crématoires qui fonctionnaient jour et nuit. J’ai finalement été transféré dans un camp de représailles, à Flossenbourg.

Comment cela se passait au quotidien ?

Pierre Ferdonnet : On nous faisait travailler jusqu’à 1h30 et on était ensuite relayé par l’équipe de nuit. Il y avait une pose d’une demi-heure pour manger la soupe... où du moins une espèce de liquide. Ensuite, après le travail forcé, on nous donnait un morceau de pain. Puis on rentrait dans le bloc et on allait se coucher. On couchait à quatre par paillasse : deux dans un sens et deux dans l’autre. A quatre heures du matin, il y avait l’appel pour aller au travail. Le dimanche, on restait dans le camp. On ne savait pas quoi faire, bien sûr. Et puis le lundi, ça reprenait.

Comment se déroulait la sélection pour les chambres à gaz ?

Pierre Ferdonnet : On était arrêté en grand nombre. On amenait les femmes, les hommes, les enfants, les vieillards... Les enfants étaient séparés de leur mère, et les femmes de leur mari. Mais ils allaient tous dans la même direction : les chambres à gaz. Avant le crématoire, il y avait la chambre où l’on préparait les cadavres. Les vêtements et les bijoux étaient récupérés... La plupart de ceux qui travaillaient dans les crématoires étaient des Polonais. Ils restaient six mois à faire ce travail. Ils avaient ainsi droit à un régime particulier, notamment au niveau de la nourriture. Mais au bout de six mois, c’était à leur tour de passer dans les crématoires.

Y-avait-il des révoltes dans les camps ?

Pierre Ferdonnet : Je n’en ai jamais vu. Nous étions dans un état physique lamentable : nous n’aurions pas pu aller bien loin. Certains ont essayés de s’évader. Un soir, nous avons étés réunis sur la place d’appel pour assister à la pendaison d’un polonais qui avait le bras cassé. Il était debout sur un tabouret avec une corde au cou qui était reliée à une charpente. Le commandant SS s’est approché pour retirer le tabouret. A ce moment, le polonais d’un pied a envoyé un grand coup dans la poitrine du SS et de l’autre a fait tomber le tabouret. On nous a forcé à rester la toute une partie de la nuit, dans le froid, pour " admirer le pendu ". C’était la mesure de représailles du commandant SS qui avait été bien amoché.
Il y avait beaucoup de pendaisons. On arrivait tout de même à l’intérieur des camps à faire de la résistance. Mais ce n’était pas facile. Il fallait qu’il y ait parmis les français ou les allemands, des personnes sûres. A Flossensbourg, nous avions réussi à former un petit groupe de résistants autour d’un ancien député allemand qui avait été emprisonné au moment de l’arrivée de Hitler au pouvoir. Nous sabotions les pièces que l’on nous faisait construire.

N’y avait-il que des SS Allemands pour s’occuper des camps ?

Pierre Ferdonnet : Oui, mais il y avait des personnes d’autres nationalités qui faisaient fonctionner ce système. A Bourges, par exemple, il y avait Paoli.

En 1948, comment avez-vous été accueilli par vos compatriotes ?

Pierre Ferdonnet : Indifférence totale. Les gens ne nous écoutaient pas. De toute façon, nous devions nous réinsérer, alors on parlait peu des camps.

Certains hauts dignitaires nazis ont été pendus, quelques uns ont été jugés à l’image de Paul Touvier... que sont devenus les autres ?

Pierre Ferdonnet : On a simplement l’exemple d’un camps où les américains ont livré le responsable nazi aux prisonniers soviétiques qui lui ont infligé toutes les heures 25 coups de Chlag. C’était un traitement que nous subissions régulièrement. On nous mettait sur un tabouret, les fesses à l’air et on nous administrait 20 coups de Chlag. C’était un morceau de caoutchouc rempli de sable avec au bout, un boulon. Quand vous avez reçu 25 coups et que vous n’êtes déjà pas dans un bon état physique, vous arrivez à vous en sortir une fois, mais pas deux. Le responsable nazi, lui, a reçu 25 coups toutes les heures, si bien qu’à la fin de la journée, il était mort. C’est le seul cas à ma connaissance. Vous savez, parmis les SS, il y en a beaucoup qui sont partis à l’étranger : aux Etats Unis, en Argentine, en Espagne...

Vous intervenez beaucoup en milieu scolaire : quelles sont les réactions à vos récits ?

Pierre Ferdonnet : On s’aperçoit que les jeunes s’intéressent beaucoup à ce que l’on raconte. C’est un travail que l’on continuera à faire de manière à ce que plus jamais de telles choses se passent. Les dangers existent. En Autriche, bien sûr, mais pas seulement. A Anvers, les extrémistes sont arrivés en tête des élections avec 38% des voix. Ces dangers existent aussi en Italie. Ils existent encore chez nous. Quoi qu’on en dise, Le Pen et Mégret sont toujours là. Et puis on assiste à une montée en puissance des négationnistes qui falsifient l’histoire. Tant qu’on pourra le faire, on continuera à témoigner pour appeler à la conscience des jeunes.

commentaires
Souvenirs d’un camp nazi - CHAGNAUD - 6 janvier 2008 à 16:04

J’ai été très frappé par le témoignage de monsieur FERDONNET car c’est la première fois que je lis un récit sur la vie dans ce camp et pourtant j’ai toujours entendu parler de FLOSSENBOURG puisque mon oncle, frère de ma mère, y est décédé le 22 avril 1945 abattu par les SS qui fuyaient devant l’avance américaine en emmenant les prisonniers et en éliminant ceux qui étaient trop faibles. Monsieur FERDONNET a-t-il des informations plus complètes à ce sujet ou est-il en mesure de me fournir des réferences de lecture ? Mon autre oncle, son frère, m’a dit récemment que les prisonniers travaillaient dans une carrière ? C’est lui qui au retour des corps est allé le reconnaître à Nantes où il est inhumé ; il s’appelait Jacques BOUYER Classe 1935.
J’aimerais bien aller sur les lieux de ce camp, s’il a été conservé pour le recueillement.

Bien cordialement,

Pierre Chagnaud, Nantes.


#9386
Souvenirs d’un camp nazi - Mercure Galant - 6 janvier 2008 à  21:19

Bonsoir Monsieur Chagnaud,
je prends l’initiative de transmettre votre message à cette adresse :

Musée de la Résistance et de la Déportation
de Bourges et du Cher
Halle St Bonnet - Rue Parmentier
8 Bd de la République
18000 BOURGES
02.48.69.02.62.
e.mail : musee-resistance@wanadoo.fr

Si Monsieur Ferdonnet peut apporter quelques éléments de réponse à vos questions, vous pourrez toujours essayer de passer par cet intermédiaire pour prendre contact avec lui.
Bien cordialement.

#9389 | Répond au message #9386
Souvenirs d’un camp nazi - bruché-Monthillot Florence - 25 août 2007 à 11:51

Je viens de lire avec émotion vos souvenirs du camp de flossenbourg. Je suis d’autant plus émue que je peux ainsi visualiser ce qu’a été la vie de mon grand-père dans de camp. Il avait été arrêté à Troyes avec son beau-père. Eux aussi avaient été dénoncés. Je reviens d’Autriche-Hongrie où j’ai visité le camp de Mauthausen. J’ai ressenti une vive émotion mais moindre qu’en lisant votre récit. Je pense que celà tiens au fait que les panneaux sont en langue allemande...Sur les photos que j’y ai vu, je peux "inscruster" votre récit. Je vous en remercie. Je ne pense pas qu’il reste beaucoup de survivants de ce camp !


#8086
Souvenirs d’un camp nazi mais URGENT concert nazi le 15 septembre : la bête n’est pas morte - metalcav18 - 10 septembre 2007 à  14:00

Lu sur le myspace de BRUTAL BEGUDE, groupe nazi black metal de Marseille qu’ils venaient jouer sur Bourges samedi 15 (taper le nom ds google). Ils joueraient avec un groupe nazi de Clermont DIABOLICUM SIGILUM et surtout un groupe local WOLFSANGEL des gros nazis qui ont aussi un my space, on voit leurs photos, et dont je ne connaissais pas l’existence !? je croyais qu’il n’ y avait qu’EUROPA NOSTRA dans le Cher ? Le SCALP 18 prévoit-il de prevenir les pouvoirs publics ou les médias sur cet evenement très grave ! ? Organiser une manif ? BRUTAL BEGUDE est connu ds le milieu metal comme tres dangereux et extremiste, vous ecouterez leur chansons !Attention aux gars samedi risque de violence, leur tract appel à detruire le scalp, avant le nouveau concert de soutien prevu en novembre avec les tazons.
En tout cas wolsangel de Bourges, europa nostra de Bourges, Insurrection de Chateauroux, l’Action Française a lignieres, Le Renouveau Français actif ds le berry (allez voir leur site, y’a pleins de photos ), le FNJ ou le FN avec ces colleurs d’affiches skinheads, ça fait beaucoup pour le Berry.... L’urgence c’est le 15 en attendant !Merci de faire suivre l’info.

#8111 | Répond au message #8086