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ENTRETIEN

Annie Frison : « les mesures gouvernementales sont des violences faites à nos concitoyens »

dimanche 2 mai 2004 à 14:38, par Charles-Henry Sadien

Conseillère municipale de la majorité socialiste et communiste de l’époque à Bourges jusqu’en 1995, Annie Frison est surtout connue pour sont travail de longue haleine en faveur de la paix au sein du Collectif 18, à travers l’organisation de manifestations et de conférences à Bourges. Son mouvement participait au K-O Social qui se déroulait durant le Printemps de Bourges à l’initiative des Têtes Raides. Une réussite, selon elle, qui a permis à des organismes de différents horizons de se rencontrer et d’échanger leurs idées. Rencontre, juste avant un voyage à New-York à l’ONU ou Annie Frison prendra position avec de nombreuses ONG pour la non prolifération et l’abolition des armes nucléaires.

Pourquoi avoir choisi de participer à ce K-O social à Bourges ?

Annie Frison : Cette participation au K-O social a été très intéressante. Pour plusieurs raisons. D’abord, cela nous a permis de travailler avec différentes associations. Vous allez me dire que j’ai l’habitude à Bourges puisque nous coordonnons le Collectif 18 contre la guerre, avec une quarantaine d’organisations. Mais là, c’était différent. J’avais entendu parler du K-O social qui s’était déroulé à Paris. Il y en avait eu aussi un premier à Lyon. C’était un peu la découverte pour nous. Mais cela nous paraissait assez évident au regard des mesures asociales du gouvernement. Ce sont des violences qui sont faites à nos concitoyens. Et comme nous nous occupons de la « culture de la paix », c’est-à-dire pour que les conflits entre les gens soient résolus de façon pacifique, le K-O Social de Bourges nous interpellait profondément.

Ce mouvement pourtant de moins en moins l’unanimité. Il y a eu beaucoup de discordes, puisque certains se sont retirés puis ont craché dans la soupe…

Annie Frison : Je vais parler pour d’autres, mais je pense que certaines associations ont des difficultés pour travailler avec d’autres associations. C’est vrai qu’il est difficile d’arriver à trouver des compromis, à s’accepter les uns les autres, tels que l’on est pour militer ensemble sur un thème choisi communément. Avec certains, je crois que ce n’est pas possible (rires), mais ça va peut-être venir. C’est la première fois que je participais à une manifestation dans ce cadre-là. C’est-à-dire un K-O social qui ne demandait pas à ce que l’on mette ses propres références à un mouvement, un syndicat, un parti politique. C’est peut-être un peu dommage, car dans le milieu associatif, il y a tout de même beaucoup de militants politiques. Ça ne s’invente pas de militer. C’est une question d’éducation au militantisme.

Est-ce qu’il va rester quelque chose de ce K-O social pour Bourges, et plus largement pour la défense des mouvements sociaux en France ?

Annie Frison : Pour Bourges, nous avons eu depuis un mois des réunions assez importantes les uns avec les autres. On a appris à se connaître d’une façon différente. Pour moi, l’objectif n’était pas de militer contre la guerre, mais d’apporter une nouvelle façon de voir les choses en parlant de la « culture de la paix », et pour dire que l’on peut faire autrement, en proposant des choix. Nous avons proposé « la culture de la paix » parmi les huit thèmes proposés pour ce K-O social. Il s’agissait de d’intégrer aussi la vision des autres par rapport aux différents thèmes. Par exemple, parler des réfugiés par le comité de vigilance : ce sont tout des violences faites à ces gens qui n’ont pas de papiers et que l’on renvoie dans leurs pays. En tant que mouvement pour la paix, nous avons pris position pour estimer que ce n’était pas normal. Et on essaye de s’attaquer aux causes. Pourquoi y-a-t-il des réfugiés dans le monde ? Il y en a actuellement 20 millions ! Ce sont les guerres majoritairement qui sont la cause de ces mouvements de fuites dans le monde.

Le K-O social était-il « trop gentillet » ? On entendait en queue de manifestation des participants criant « la lutte sociale n’est pas une soirée de gala » alors que dans les premiers rangs, il y avait un slogan unique, « K-O social ! » comme si il n’y avait rien à dire et que ce mouvement était finalement vide de sens parce que vidé de tout engagement politique. On a l’impression que le K-O social a honte de faire de la politique et de s’engager véritablement. Est-ce qu’il ne faut pas, à un moment donné, lorsque les discussions et les discours n’obtiennent aucune réponse, durcir le mouvement ?

Annie Frison : Là, vous voulez me faire parler sur un terrain politique sur lequel je refuse de m’engager en tant que militante au mouvement pour la paix ! Il faut être ensemble pour pouvoir faire changer les choses. Je n’aime pas ce mot, mais il s’agit d’un rapport de force. Il faut être nombreux ensemble, pour montrer ce qui ne va pas. Et en même temps proposer des choses. Il me semble que de ce point de vue, le K-O social de Bourges était intéressant. Ce n’est peut-être pas suffisant, mais dans le fonds, en France, on est tout de même dans un pays démocratique. Il y a le droit de vote. On ne mesure pas assez l’importance du vote. Je vais faire référence aux prochaines élections. Les élections européennes qui se dérouleront le 13 juin. Un seul tour. Au mouvement pour la paix, nous n’allons pas appeler à voter pour telle ou telle liste. Mais on essaye de montrer qu’il serait possible de faire une autre Europe. Une Europe de paix, à l’initiative des pacifistes italiens qui demandent que l’article 1 de la constitution Européenne porte vraiment la référence d’une Europe de paix et qui ne soit pas simplement un mot pieux. Qu’il y ait cette volonté de résoudre pacifiquement les conflits et d’avoir comme unique référence l’ONU. C’est-à-dire l’ensemble des nations du monde. On demande aussi que l’Europe ne soit pas une puissance comme les Etats-Unis, c’est-à-dire une puissance militaire terrible. Il y a un budget mondial militaire de 900 milliards d’Euros et les Etats-Unis représentent la moitié de ce budget ! Ce qu’il faut au contraire, c’est que l’on ait une Europe capable d’avoir des initiatives social et qui ne se contente pas de penser en terme d’initiative militaire et de rapport de force.

Quelques mots sur le déroulement du printemps de Bourges ? Il est question de « renouveau » par opposition aux dérives financières des années précédentes. C’est un renouveau que vous ressentez et que vous confirmez ?

Annie Frison : Oui, je trouve ce Printemps très agréable. Je n’ai manqué qu’un Printemps depuis 1976. Mais ce Printemps a regroupé beaucoup d’initiatives comme celle de la radio Biturige et du journal « Le Petit Bourgeons », à la fois avec cet humour et ce regard critique qui manquaient les années précédentes. Le Printemps de Bourges, ce n’est pas que la musique. Le K-O social a beaucoup apporté au Printemps de Bourges, avec ce mélange de revendications. J’admire beaucoup les intermittents. Cela fait un an qu’ils se battent et ça continue. Grâce à leur abnégation, cela donne le courage à l’ensemble du mouvement social de continuer la mobilisation. Il y a les chercheurs qui ont continué également à lutter, montrant que c’était la seule voie possible pour obtenir des résultats.

commentaires
> Annie Frison : « les mesures gouvernementales sont des violences faites à nos concitoyens » - 13 mai 2004 à 01:16

Conseillère municipale d’opposition communiste à Bourges jusqu’en 1995

A l’époque surtout conseillère de la majorité d’alors (1977-1995 : J. Rimbault et J.-C Sandrier).


#1445
> Annie Frison : « les mesures gouvernementales sont des violences faites à nos concitoyens » - JMP - 13 mai 2004 à  10:19

Euh, oui, c’était le bon temps !! J’ai effectué les corrections nécessaires. Merci !

JMP

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