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Élections piège à cons - bombix - 3 mars 2012 à 17:20

mais en effet, nationalisme, souveraineté du peuple, sont des notions très délicates et elles ne peuvent je crois échapper à une réflexion politique, historique de fond.

Quelques repères :

1. La nation, avant d’être une valeur revendiquée par "la droite", est une valeur revendiquée par "la gauche". En réalité, la gauche française n’est pas homogène. La gauche d’aujourd’hui, ce que l’on nomme telle, est née avec l’affaire Dreyfus, avec la fusion de courants politiques — radicaux et socialistes — qui alors s’opposaient. Quoiqu’il en soit, il suffira de rappeler Valmy. Il suffira de rappeler que dans le déclenchement de la Commune, le facteur patriotique fut essentiel : « Les insurgés vibraient d’un patriotisme de gauche que la honte de la défaite exaspérait. » (Jean-Jacques Chevalier, Histoire des institutions et des régimes politiques de la France de 1789 à 1958, p. 294.) Il suffira aussi de rappeler Marx : « Le meeting de St Martin Hall, en 1864 qui fonda la première Internationale avait deux objets sans rapport immédiat avec la défense des intérêts internationaux de la classe ouvrière : la défense de l’indépendance nationale de la Pologne et celle de l’Irlande ... « Une nation qui en opprime une autre ne saurait être libre » disait Marx à l’adresse des ouvriers anglais qu’il appelait à soutenir la cause nationale irlandaise. » (in Denis Collin, Le socialisme et la nation)

2. L’oubli de la nation par une certaine gauche et extrême gauche post soixante huitarde est la conséquence d’une confusion entre internationalisme et mondialisme. En gros, le "parti du mouvement" croyant que le capitalisme est nationaliste par essence, a cru bon de défendre le mondialisme comme anti-nationalisme ; croyant que le capitalisme est patriarcal et défend la famille, a cru bon de répéter après Gide "Famille je vous hais" ; croyant que le capitalisme réprime la sexualité et est puritain, s’est écrié : "il est interdit d’interdire ! jouissons sans entraves ! plus de tabous !" ; croyant que le capitalisme est autoritaire et fasciste, a confondu toutes les formes d’autorité avec le fascisme, en s’attaquant d’abord à l’autorité des maîtres d’écoles (c’était plus facile il faut bien dire !)

3. En réalité, le capitalisme n’est nullement lié la famille, en particulier le capitalisme de troisième type que nous connaissons ; le capitalisme n’est pas national par nature, il est mondial. Et là, il faut se référer aux travaux fondateurs de Fernand Braudel ; le capitalisme n’est pas autoritaire : il dissout les anciens liens et les relations qui reposent sur des dépendances personnelles, tel que le féodalisme pour instituer des rapports contractuels (voir encore une fois le Manifeste qui dit les choses très clairement !)

4. La gauche post soixante-huitarde — qui constitue l’armature du PS actuel — a donc été la matrice idéologique idéale pour faire admettre les exigences du nouveau capitalisme. Voir les descriptions de la critique artiste du capitalisme dans Luc Boltanski, Le nouvel esprit du capitalisme. Les mouvement qui semblaient contester l’ordre établi en constituaient en réalité la pointe avancée. D’où la situation macaronique que nous connaissons, symbolisée par l’engagement de Toni Negri en faveur du Oui pour le TCE.

Je conseille la lecture de l’article de Collin que j’ai mis en lien. J’en retiens pour ma part cette remarque de première importance : « Si la lutte des classes est internationale dans son contenu, elle reste nationale dans sa forme, et la forme n’est pas une question secondaire, puisque c’est ce qui permet l’existence déterminée effective, de la matière. Certes, « les prolétaires n’ont pas de patrie », mais c’est seulement dans le cadre national, en posant la question de la conquête du pouvoir politique que l’émancipation de la classe ouvrière peut être engagée. »

Il n’y a pas de République sans nation. Pas plus qu’il n’y a antinomie entre la République et le socialisme.
Au contraire, à la suite de Jaures, on peut réaffirmer que "le socialisme, c’est la République poussée jusqu’au bout."


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