La Chancellerie lance un SOS
Vidé de ses habitants par le Plan de Renouvellement Urbain, le quartier de la Chancellerie souffre de plus en plus. Sans consommateurs, les commerces ferment inéluctablement, laissant les rescapés du quartier dans une situation d’isolement particulièrement dramatique notamment pour les personnes âgées et pour les plus démunis. Samedi, un rassemblement était organisé devant l’enseigne Champion qui vient de fermer ses portes. Il n’y a désormais plus de commerce de proximité à la Chancellerie.
Il y avait autant de monde lors du rassemblement contre la fermeture des commerces à la Chancellerie que lors de la manifestation, quelques mois plus tôt, à la gare de Bourges pour réclamer un TGV. Avoir l’opportunité d’aller travailler à Paris dans de bonnes conditions, c’est bien. Pouvoir s’alimenter dans son quartier, c’est vital. Les participants des deux manifestations n’étaient visiblement pas du même monde : il y avait des « français moyens » voire aisés, des chefs d’entreprises, et des élus de droite pour défendre un TGV à Bourges, tandis que l’on retrouvait des militants associatifs, des habitants très modestes du quartier, et des élus de gauche pour défendre le droit de vivre décemment à la Chancellerie. Si personne – très intelligemment - n’a mis en exergue la récupération du projet TGV par la droite, il y a fort à parier que celle-ci, hurle encore à la manipulation des quartiers par « les socialos-communistes », comme cela à été dit juste avant les vacances d’été par le maire adjoint Philippe Bensac et par le conseiller municipal Hassen Chebili. A chacun son sens de l’intérêt général et des responsabilités. Certains sujets ne méritent pas d’être bêtement politisés et appellent au contraire à un pragmatisme et à une reconnaissance de ses propres turpitudes.
Il faut d’ailleurs souligner, que d’après les déclarations des organisateurs du rassemblement, les élus de la majorité municipale n’étaient pas exclus. Ils étaient même attendus (en particulier M. Poulet, conseiller municipal et directeur de Champion). Mais ils avaient préféré se pavaner avec de grands sourires fraternels lors de la manifestation Lire en Fête 2008 [1], qui se déroulait à quelques mètres de là [2] plutôt que de répondre au désarroi de la population.
C’est sans doute pour ne pas susciter les réactions déplacées et indécentes d’une certaine droite quelque peu décomplexée dans la vulgarité, le dogmatisme et l’inintelligence, que les différents intervenants de ce rassemblement se sont efforcés d’être mesurés et n’ont pas cherché à flinguer la majorité municipale, y compris lors des interventions de Jean-Claude Sandrier (député, PCF) et d’Irène Félix (vice-présidente du Conseil Général, PS) [3]. Au contraire, ils se sont réjouis qu’une solution puisse - hypothétiquement - bientôt être trouvée dans l’urgence pour permettre aux habitants de se procurer des produits de première nécessité.
Mais comment imaginer que la municipalité n’ait prévu aucune mesure transitoire entre les démolitions massives et la reconstruction du quartier (qui aboutira de toutes façons à une perte d’habitants) ? Comment imaginer que durant trois ans, des personnes souvent âgées et vivant modestement grâce au « Minimum Vieillesse », des personnes au RMI sans moyens de locomotion, ou des personnes handicapées, puissent tenir le coup, marchant sur des gravats, traversant des routes défoncées, pour, au milieu des décombres, aller faire leurs courses dans le meilleurs des cas au Centre Commercial « Cap Nord », situé dans le quartier des Gibjoncs de l’autre côté de l’avenue du Général de Gaulle ? Ce sont les questions que se sont posés Lucien David, et Antonio Garcia de l’Union Amicale des Habitants des quartiers Nord de Bouges.
Les élus ont-ils conscience du quotidien difficile des habitants de la Chancellerie ? On peut en douter lorsque l’on voit que l’enseigne Champion du Conseiller Municipal, M. Poulet, propose un portage à domicile des courses pour un montant minimum de 45 euros d’achat avec un surcoût de 8 euros. Une offre qui est jugée comme inadaptée par les habitants du quartier qui, pour nombre d’entre-eux n’ont pas ce pouvoir d’achat.
"Ce n’est pas aux associations de se substituer aux devoirs de la municipalité" ont déclaré Lucien David et Antonio Garcia qui estiment surprenant qu’il ait fallu une pétition regroupant un millier de signatures et une mobilisation des habitants pour réveiller des élus qui se retrouvent aujourd’hui forcés de réagir dans l’urgence et la confusion.
"Et l’urgence, c’est pour demain, pas pour après-demain hein ! Vous voyez ce que je veux dire !", déclarait en aparté Lucien David.
Depuis ce Dimanche, la Chancellerie ne dispose plus de commerce de proximité.
[1] Eric Maginiau (Maire-adjoint chargé de la politique de la ville), Bernadette Guille (Maire-adjoint chargé de l’intergénérationnel et présidente du Centre Associatif du Hameau de la Fraternité) distribuaient les gâteaux réalisés par les habitants.
[2] Une manifestation beaucoup moins fréquentée cette année en raison du plan de renouvellement urbain qui a vidé le quartier d’une partie de sa population...
[3] Yann Galut (vice-président du conseil Général PS) et Yannick Bedin (Conseiller Municipal, PCF) étaient également présents pour manifester leur solidarité avec les habitants de la Chancellerie.