Le Crédit Mutuel « donne le La » et harcèle ses employés !
Pour une fois, la chaîne télé hertzienne France 2 a eu du courage en diffusant le documentaire de Paul Moreira sur le thème de la souffrance des employés en France écrasés sous le joug de la mondialisation néo-libérale, à travers l’exemple du Crédit Mutuel. Tandis que le principal sponsor du Printemps de Bourges s’affiche comme un partenaire un peu embarrassant, les exemples de harcèlement se multiplient dans tous les secteurs d’activité en France.
Voici les faits tels que les rapportent France 2 ainsi que le magazine Télérama : deux cadres supérieurs de direction commerciale menaient une carrière exemplaire au sein de la Banque du « C.I.C. », tachant de concilier exigences commerciales et éthique basée sur la compréhension vis-à-vis des autres employés voire même à l’égard des clients endettés. L’un de ces employés, Jean-Marc Trichard, eut même les honneurs de sa direction locale puisqu’il fut choisi pour représenter le C.I.C. dans une campagne de publicité. Ce dernier retrouva ainsi son beau visage sur tous les panneaux publicitaires Decaux qui agrémentent les paysages de notre doux pays… Jusqu’ici, tout va bien.
Et puis, patatras ! Dans le cadre de la dure concurrence dans le monde bancaire, le « C.I.C. » est racheté en 2004 par le « Crédit Mutuel », lors d’une belle O.P.A. de fusion que les traders affectionnent tout particulièrement. Et là, tout se met à déraper pour M. Trichard qui est convoqué chaque jour par son nouvelle direction du « Crédit Mutuel » : on exige de lui qu’il mette la pression sur ses collaborateurs et on l’oblige à les traiter « à coups de pieds au cul »
Trichard résiste, tente d’argumenter en rappelant ses états de service. Mais rien n’y fait. Tout s’accélère et Trichard décrit par le menu sa lente descente aux enfers dans le documentaire de « France 2 » avec des brimades continuelles et des conflits quotidiens. Les nouveaux dirigeants commerciaux du « Crédit Mutuel » lui mettent une telle pression qu’ils vont jusqu’à organiser des « stages de remotivation » au cours desquels des comédiens professionnels mettent en scène des sketchs ridiculisant Jean-Marc Trichard et ses plus proches collaborateurs.
Ainsi, en 2004, c’est au tour de Roger Grégot, manager de la première heure de l’équipe de J.M. Trichard, qui se voit accusé d’être « trop affectif avec ses subalternes ». La crise augmente encore et les deux ex-cadres commerciaux du Crédit Mutuel vont être laminés.
Mais leur cas n’est semble-t-il pas isolé puisque qu’il est évoqué un « vaste plan destiné à déshumaniser le C.I.C. lors de sa fusion avec le Crédit Mutuel ». Pourquoi ? Selon eux, le Crédit Mutuel a « bousculé nombre de vies au nom d’une politique visant à toujours plus de rentabilité ».
Au bout de huit mois de brimades, Jean-Marc Trichard craque et sa situation psychologique est tellement suicidaire que son médecin référent décide de le soigner à coup d’anti-dépresseurs. Le processus est malheureusement bien connu pour être inexorable : le traitement ne modifie pas la réalité du harcèlement et la pression constante conduit inexorablement à une série d’arrêts de travail. La spirale du licenciement est enclenchée et l’ex-grand directeur commercial est viré en 2005, tout comme Roger Grégot dont l’exclusion intervient peu de temps après.
Le cas du « Crédit Mutuel » n’est pas isolé : les plates-formes téléphoniques (souvent régies par la surveillance électronique) comme le site d’infomobile à Bourges ou encore le secteur de la sidérurgie sont particulièrement touchés. La précarisation et l’exploitation de la peur du chômage ont favorisé cette course acharnée à la compétition, qui conduit à de nombreux abus, voire à des drames humains. Tout cela est habilement masqué par des politiques de communication à travers la publicité et l’événementiel. Ainsi, par exemple, Le Crédit Mutuel s’achète une image positive en sponsorisant Le Printemps de Bourges et en devenant ainsi symbole de loisirs, de joies, de liberté, voire même de revendications engagées mais aussi de la « branchitude » et des paillettes.
Au-delà de l’hypocrisie du Crédit Mutuel, « donneur de La » côté cour durant Le Printemps et « harceleur » durant l’année, côté jardin, il faut peut-être se poser la difficile question de l’éthique en matière de sponsoring à la culture et au sport, deux secteurs qui ne sont pas sans évoquer la fameuse formule « Du pain et des Jeux pour le peuple » d’un Nicolas Sarkozy qui ne montre pas vraiment le bon exemple en n’hésitant pas à traiter financièrement avec les pires régimes politiques du monde comme la Chine de Hu Jintao, la Russie de Vladimir Poutine ou la Lybie de Mouammar Kadhafi. A croire que la course aux profits et la recherche d’une certaine éthique sont antinomiques.
Documentaire de Paul Moriera « Travailler à en mourir », France, 2007, diffusé sur France 2 le 13 et le 14 mars dernier.