Gilets Jaunes & CGT : Assemblée Citoyenne & Vrai Débat à Saint-Germain-du-Puy
180 personnes attentives pour cette assemblée œcuménique, c’est pas si mal mais on subodore que des Gilets jaunes et des cégétistes ont boudé et n’ont pas voulu se cotoyer les uns et les autres.
Une assemblée mitoyenne
Le 15 février, c’était donc l’Assemblée citoyenne des Gilets jaunes avec la particpation de la CGT. Cette assemblée était annoncée sur une page facebook des Gilets Jaunes locaux, Le Cher en Colère. La CGT annonçait aussi cette réunion mais en l’appelant le Vrai Débat. L’Assemblée citoyenne étant ainsi une assemblée mitoyenne Gilets jaunes & CGT.

Des politiques en campagne ?
On pouvait voir quelques têtes politiques qui seront nommées dans l’article du Berry Républicain : Irène Félix (Parti Socialiste) et Yannick Bedin (La France Insoumise). Irène Félix, attentive aux prises de paroles, restera durant les presque trois heures de débat (elle ne partira que 10 minutes avant la fin). Mais… Yannick Bedin fera l’inverse : un passage avant le début du débat, histoire d’être dans le Berry Républicain et il s’éclipsera illico.
Il y avait bien sûr aussi la madame maire de Saint-Germain-du-Puy, Marie-Christine Baudouin (PCF), puisque c’était la municipalité qui permettait l’utilisation de la salle Nelson Mandela où se tenait cette assemblée.

Un débat bien organisé
Comme on peut le voir sur cette photo publiée sur la page Facebook Blocage National dans Le Cher l’assistance est bien sage. Les personnes qui voulaient prendre la parole recevait un ticket avec un numéro comme pour les guichets de la sécu. Ça a l’avantage de pouvoir dire ce qu’on veut dire tranquillement, mais l’inconvénient c’est que il n’y a pas forcément de discussion.
En introduction, on entendit deux Gilets Jaunes marcheurs de La marche pour la Vie qui se trouvaient avoir fait étape à Bourges. Bon, j’ai pas tout compris car la fatigue des marcheurs aidant, c’était un peu confus comme prise de parole et carrément un peu trop long – mais j’ai bien entendu que y’a eu une allusion aux émigrés qui dès qu’ils arrivent en France, ont le CMU et tout ça alors que certains français ne peuvent pas l’avoir. C’était un peu étrange d’entendre ça lorsque l’orateur dit qu’il était lui-même d’origine sicilienne…
Chacun sa partition
Ce qui traverse beaucoup d’interventions, c’est que chez les Gilets Jaunes ont trouve ce que l’un va appeler « une vraie fraternité ». Cette fraternité découverte sur les ronds-points, cette entraide spontanée, cette solidarité qui fait chaud au cœur, tout ceci, ça compte quelque part pour la poursuite du mouvement. Auto-boulot-dodo, ça fait moins rêver.
Tout n’est pas bisounours puisque quelqu’un dira « qu’il faudrait moins se chamailler » – et si on lit les pages facebook, aïe, aïe, l’ambiance.
Chacun, chacune va y aller de son idée. Déposer une plainte contre l’Etat français, car on a un gros problème à la tête de cet Etat. Organiser une journée sans achat, sans télé, sans rien. Virer Macron sinon on ne pourra rien mettre en place. Recréer du tissu social et consommer local. On aura même un conseil de lecture : relire tout Marx !
On aura droit aussi à quelques marronniers. L’Islande qui n’aurait pas payé sa dette. Le CNR (Conseil National de la Résistance) qui aurait tout crée. Notre système d’assurance maladie admiré partout dans le monde (sauf… par nos régimes spéciaux et l’Alsace-Lorraine, entre nous).
On aura aussi une théorie un peu complotiste de l’économie : avant y’avait le troc, mais ils ont inventé la monnaie, ils ont complexifié l’économie. Ils ? Et on en est là.
Le vrai sujet c’était les moyens de vivre, c’était le pouvoir d’achat. C’est bien sûr la grosse revendication. Un jeune homme va s’insurger contre cette demande de toujours plus d’argent : « Je ne suis pas d’accord avec le pouvoir d’achat. » Le mouvement des Gilets Jaunes « n’est pas qu’une question d’argent ». Il est l’expression d’un « manque de quelque chose ».
Des intervenants lui répondront : pour une petite retraite, un peu plus de pouvoir d’achat, c’est vital, c’est prioritaire, sinon on ne vit pas. Il faut pourvoir se loger et payer un loyer, se nourrir, payer son eau, son courant électrique. On ne demande pas de l’argent pour avoir encore plus d’argent : mais pour pouvoir vivre le mois entier à peu près sereinement.
Et le Référendum d’Initiative Citoyenne dans tout ça ? ce fameux RIC qu’on voit sur les pancartes ? Personne n’en parlera, personne. Lorsque les Gilets Jaunes parlent spontanément, c’est de leur vie, de leur envie de vivre mieux, pas de RIC, on dirait.
Les mitoyens parlent aussi
Les Gilets Jaunes ne seront pas les seuls à causer, quelques militants politiques ou syndicaux donneront aussi leur avis.
L’une réclamera une dissolution de l’Assemblée Nationale et de nouvelles élections – Humm ? Comme en 68 ? Lorsque de Gaulle enterrera mai 68 avec une dissolution et de nouvelles élections qui conforteront sa majorité réactionnaire ?
Un autre nous entretiendra de 1789, et de la Constitution Française qui serait bafouée par le gouvernement, en citant : « Les distinctions sociales ne peuvent être fondées que sur l’utilité commune. » – une citation à double tranchant : on y admet des distinctions, des différences sociales. On va les fonder sur l’utilité commune. C’est ainsi qu’on dit : il faut bien des créateurs d’entreprises, il faut des patrons qui donnent du boulot à des milliers de personnes et qui doivent être rémunérés en conséquence.
Un Gilet Jaune fera remarquer que le mouvement a obtenu au moins quelque chose que les syndicats n’avaient pu obtenir. Un autre trouvera que les distinctions gauche-droite deviennent inutiles, qu’il faut se rassembler.
Un syndicaliste, Jean-François, admettra que sur la période récente, les syndicats semblent avoir moins obtenu que les Gilets jaunes, c’est vrai. Il faudra réfléchir aux méthode, mais il faut considérer sur une période plus longue pour juger des résultats. Ce qu’ont obtenu les Gilets Jaunes, ce sont quelques gestes qui seront payés par nos impôts, « ce sont les limites de l’exercice. »
Pour la politique, c’est un Patrick qui s’y collera, avec une intervention brève mais subtile. À la chambre des députés, le PCF a déposé des amendements pour défendre les petites gens. Les députés de l’autre camp, droite et extrême-droite, ne déposent rien dans ce sens. On peut ainsi faire la différence entre « ceux qui vous défendent et ceux qui ne vous défendent pas. »
La vraie vie est absente
Les Gilets Jaunes étaient venus d’un peu partout : d’Aubigny-sur-Nère, de Mehun-sur-Yèvre, de Morogues, de Vierzon, de ces endroits qui passaient sous les radars syndicaux. Chacun et chacune l’a dit à sa façon : on veut vivre autrement. Oui, on a un manque de quelque chose, un manque de vie qu’on ne peut vraiment définir. Une jeune femme de Morogues conclura avec sincérité sur ce contact perdu avec la vie, avec ce qui nous entoure.
Et les perspectives ? On n’en aura pas parlé. Comment le mouvement pourrait-il grossir ? Où serait le second souffle ? Ce sera pour une prochaine fois. C’est peut-être ce qui manquera à cette Assemblée Citoyenne.
Bertolt Brecht avait écrit :
Lorsque j’ai demandé de quoi vivre
On m’a répondu : quel manque de pudeur !
C’est ce que nous a répondu Macron et son gouvernement.
Alors comme le disait une Gilet Jaune :
On ne lâche rien !