Un article très intéressant de Fabrice Gerschel, dans Le Monde : Pourquoi les marchés financiers n’ont-ils rien vu à Fukushima ? Allons tout de suite à la conclusion : « ... aucun gouvernement démocratiquement élu, aucun G20, aucun sursaut moral, aucun parlement des scientifiques ne parviendra à nous imposer la "sobriété" nécessaire à notre survie. La seule instance qui en ait le pouvoir, dont la volonté s’impose à tous, par-delà les frontières, ce sont les marchés. Ils ont pour cela des instruments redoutables : ils fixent le prix des actifs (et de l’énergie), ils influent sur la croissance, ils allouent l’épargne du monde. C’est pourquoi il faut s’intéresser aux marchés, à leurs mécanismes, et à leurs points aveugles. »
Or, justement, Fukushima est un point aveugle. Gerschel déroule une série d’hypothèses pour l’expliquer. Une assez bonne illustration de la thèse de JP Dupuy selon qui « l’obstacle majeur au sursaut devant les menaces qui pèsent sur l’avenir de l’humanité est d’ordre conceptuel. Nous avons acquis les moyens de détruire la planète et nous n’avons pas changé nos façons de penser. »
Occasion de faire une distinction entre ce qui est « rationnel » et ce qui est « raisonnable ». Les marchés financiers n’obéissent qu’à la rationalité de leurs calculs, à la loi de l’efficience. Tout ce qui y échappe n’existe tout simplement pas ! Il serait raisonnable de s’aviser qu’il existe autre chose, que le tout du réel n’est pas captable par cette rationalité-là. Et qu’à confier nos vies et notre avenir à des gens si rationnels mais aussi peu raisonnables, on risque pour le coup une sérieuse catastrophe.