Bourges, pour la fin du déclin ?
Pas moins de cinq listes seront présentes au premier tour des élections municipales à Bourges le 15 mars 2020. Trois listes de gauche et deux listes de droite. Oui, la droite et la gauche, cela existe encore en 2020 même si les repères sont très brouillés, notamment à gauche. Mais lors des élections municipales, logiquement, les enjeux locaux l’emportent sur les considérations politiques nationales. Et l’enjeu pour Bourges comme pour beaucoup de villes de la diagonale du vide, c’est de sortir du cercle vicieux d’un déclin qui semble inexorable.
Pascal Blanc, maire-adjoint aux travaux de 2008 à 2014 puis maire de Bourges depuis 2014 a l’avantage d’avoir un bilan. Enfin, pas certain que ce bilan soit à son avantage. D’ailleurs dans le bilan qu’il fait lui-même, il commence par se justifier d’une promesse non tenue, celle de ne pas augmenter les impôts...son excuse, il n’était pas au courant du mauvais état des finances de la ville de Bourges. Faute avouée à moitié pardonnée ? À moitié seulement car la maire prend ses administrés pour des lapins de six semaines. Il avait été directeur de cabinet de Serge Lepeltier, il votait de 2008 à 2014 les budgets municipaux, il gérait les travaux sur Bourges qui nécessitent quand même un peu de budget...s’il n’était pas au courant, c’est qu’il était inconséquent voir incompétent. Du bilan qu’il dresse lui-même, rien de très marquant, que des mesures banales de gestion municipale. Ce qui manque dans ce bilan, c’est le déclin de la démographie : Bourges continue de perdre des habitants depuis 1990, la ville est passée de 75 609 habitants en 1990 à 64551 habitants en 2017, avec une baisse de 2000 habitants depuis 2014. Ces chiffres de l’INSEE sont contestés par Pascal Blanc...on se demande bien sur quelle base d’ailleurs. Une baisse de 15% en près de 30 ans pendant que la population française augmentait dans le même temps de 15%. Cela fait un différentiel énorme au bout du compte et le signe que Bourges est vraiment en perte de vitesse. Une population qui diminue et qui vieillit, cela ressemble à tout sauf à un succès. D’autant que cette spirale ne pourra nous entraîner que vers une baisse des services publics et une baisse des services tout court, le tout étant piloté en fonction des coûts et des gains potentiels.
Alors que proposent les différents candidats pour arrêter cette spirale infernale ?
Pour Pascal Blanc qui se présente avec le soutien de LREM, c’est 220 propositions qui sentent bon la routine, la gestion pépère de la ville. Comme en 2014, aucun projet marquant...l’électrochoc nécessaire à Bourges ne semble pas s’y trouver.
Philippe Mousny, son concurrent de droite (Les Républicains) n’a pas l’air beaucoup plus inspiré, il veut faire de Bourges une "smart city", comprendre une ville intelligente...ça sent le lobbying de Microsoft à plein nez, mais ça semble surtout paradoxalement hyper déconnecté de la réalité et des besoins des habitants. Le délire de Pascal Blanc avec sa surveillance vidéo surdimensionnée survivra si Philippe Mousny est élu. Le pacte de Mousny a tous les atours d’un projet de droite traditionnel puisque le premier sujet abordé est la sécurité. Avec comme deuxième proposition "le développement d’une brigade canine". Voilà qui ne manque pas de chien. S’en suivent des propositions "écologiques"...mais avec comme innovation l’ajout d’une seconde sortie d’autoroute. Ça c’est de l’innovation écologique ! Il n’a pas tout compris Mousny... Ensuite, on trouve une proposition énorme, écrite en lettres capitales : "STABILISATION DE LA BAISSE DE LA POPULATION". Non, ce n’est pas une blague, c’est bien écrit dans le projet de Mousny. ÉNORME ! Bon, là, on se dit que Mousny est vraisemblablement un comique qui veut faire de la politique, c’est à la mode. Pour Mousny, "la place Cujas est le défi le plus important du centre ville". On espère que cela permettra la "STABILISATION DE LA BAISSE DE LA POPULATION" [1]. Conclusion, avec Mousny, c’est pas la révolution mais au moins on rit.
Pour sa troisième candidature comme tête de liste à Bourges, que propose Irène Félix, ex-socialiste, dont le nouveau parti est officiellement Bourges...à moins que ce soit son parti à elle. Elle le dit dans son projet simplifié, "Je veux être maire de Bourges (...) votez pour moi". C’est simple, clair, efficace. Ses priorités sont le social et l’environnement, mais elle n’oublie pas l’économie. Son projet complet détaille tout un tas de mesures qui sont centrées sur le bien vivre, le projet ayant pour ambition de "donner envie de vivre et travailler à Bourges". Irène Félix, c’est du sérieux. Mais croit-elle sérieusement que sa troisième candidature sera la bonne ?
Pour Colette Cordat (Lutte Ouvrière), comme habituellement, pas de projet municipal. Son crédo, c’est celui de son parti, Lutte Ouvrière, "Faire entendre le camp des travailleurs et des plus modestes qui le sont de plus en plus, dont beaucoup de retraités".
Enfin, the last but not the least, l’inénarrable Yann Galut, ex-PS aussi (suite à la grande pandémie datant de 2017), est le candidat d’une gauche presque unifiée. Et rien que ça, c’est presque un exploit. Il a réussi à convaincre les communistes, la France Insoumise, les écologistes, les socialistes, Génération.s de le suivre. À première vue, pas de grosses différences dans l’esprit avec Irène Félix puisque lui aussi veut que Bourges soit "Citoyenne, écologique, sociale et solidaire". Mais le chat Félix et Galut la souris ne semblent pas pouvoir cohabiter. Le projet de Yann Galut est peut-être le plus ambitieux de tous ceux qui sont proposés...mais la barre est plutôt basse, donc ce n’est pas difficile. Galut, c’est certainement aussi le candidat le plus mégalo de tous lors de cette élection. C’est certainement un inconvénient...mais pour Bourges, cela peut-être un avantage. La mesure phare, c’est la gratuité des bus qui, avec l’avenir de la place Cujas, sont les deux sujets "stars" à Bourges. Oui, ce n’est pas le Pérou non plus.
En plus d’étudier les projets des cinq candidats, vous pouvez aussi regarder le débat de 4 des candidats qui a eu lieu sur France 3 Centre Val-de-Loire le mercredi 26 février 2020. Vu la pauvreté de ce débat, on est en droit de vraiment s’inquiéter pour l’avenir de Bourges...