Critique du discours sécuritaire de la nouvelle gauche
S’il est un terrain sur lequel Ségolène Royal a voulu marquer « sa différence », c’est bien celui de la sécurité. L’enjeu est de taille, les inquiétudes de la population légitimes. On a dit, mais cela reste à prouver, que d’avoir négligé ce problème fut la cause de la chute de Lionel Jospin en 2002. Concernant les questions de violence et de délinquance, il n’y a pas de recettes miracles ni de solutions immédiates. Cela n’empêche pas de rappeler quelques principes à respecter dans l’analyse de ces problèmes. À mettre au second plan la question de la justice sociale, la gauche s’est enlisée et s’est retrouvée prisonnière de la manière droitière de poser ces problèmes. Elle propose logiquement les mêmes « solutions ». Pourtant, autoritarisme et mesures abracadabrantes ne résoudront rien. Il faut que la gauche ancre à nouveau ses analyses du côté des réalités économiques en vue de l’établissement d’une vraie justice sociale. C’est à cette seule condition que des progrès significatifs en matière de sécurité sont possibles.
Un redoutable problème : pas de réponses simples ni de solution immédiate.
Reconnaissons-le d’emblée : la question de la violence et de la délinquance est redoutable pour la gauche. Non parce qu’elle n’aurait pas les capacités de maintenir l’ordre, mais parce que l’exercice de ce maintien de l’ordre entre à un certain moment en contradiction avec son projet politique de transformation de la société. Marx a eu ce mot profond « La violence est l’accoucheuse de l’histoire » L’histoire peut-elle « accoucher » sans violence, la société peut-elle se réformer sans passer par une phase de séismes et de bouleversements ? C’est le pari réformiste. Mais pour les révolutionnaires, ce pari serait plutôt une ruse de la bourgeoisie. Une façon de maintenir le statu quo en endormant les forces qui seraient seules capables de renverser l’ordre établi.
C’est le premier aspect du problème. Le second, c’est que toute violence n’a pas une signification politique. Il y a des gens qui choisissent la violence non parce qu’ils sont des révolutionnaires mais parce que cette voix leur semble la plus facile. Ils cherchent à obtenir des avantages personnels par le moyen de la force, sans tenir compte ni du bien public, ni des exigences morales qui impliquent le respect de l’autre. De sorte qu’il faudrait démêler dans les phénomènes de violence et de délinquance ce qui relève de la question politique, et ce qui est choix délibéré de contrevenir aux règles communes pour en tirer un avantage égoïste. Cette distinction, dans la plupart des cas, est reconnaissons-le, impossible. Il faut, de plus, considérer les droits des victimes. Même si un acte s’explique, ou plutôt se comprend, par référence aux conditions objectives d’existence de son auteur, il n’en reste pas moins que la victime a subi un préjudice et qu’on lui doit réparation.
On voit qu’à poser la question ainsi, il n’y aura pas de solutions simples et immédiates à ces problèmes. Mais on peut rappeler néanmoins quelques principes dans l’analyse de la question de la violence qui distinguent radicalement la droite et la gauche dans le traitement social de ces problèmes.
Rappel d’un principe fondamental : l’abandon du moralisme.
Le premier de ces principes pourrait être celui-ci : refuser le moralisme lorsque l’on aborde ces questions. Par moralisme, j’entends cette attitude de pensée qui consiste à référer un acte commis au « bien » ou au « mal », et à ne faire jouer comme seul élément de compréhension que la « volonté » bonne ou mauvaise de celui qui l’a commis. Quoi qu’il en soit de la bonne ou de la mauvaise volonté de l’auteur d’un acte répréhensible, il faut considérer que cet acte peut aussi trouver des éléments de compréhension dans les conditions sociales de son émergence. Il est nécessaire de considérer les conditions objectives d’existence des gens, les perspectives qui s’offrent à eux, et d’analyser ces comportements comme une réponse possible à la violence qui leur est faite. La violence appelle la violence. Il ne s’agit pas d’excuser. D’un point de vue moral, chacun doit être considéré comme responsable de ses actes. C’est même une exigence éthique inconditionnelle. Lorsque l’on demande donc de placer l’analyse de la violence sur le terrain social et politique, on admet simplement que la violence est un problème qui doit s’envisager sous plusieurs angles. La définition d’un fait social, c’est qu’il s’impose aux acteurs sociaux. Cela ne veut pas dire que ceux-ci ont perdu toute liberté. Cela signifie que les conditions d’exercice de cette liberté - leur situation - dépendent de facteurs sur lesquelles les individus n’ont pas prise immédiatement. Un délinquant doit toujours être considéré comme responsable. Mais en même temps il faut admettre que les conditions dans lesquelles il était placé ont compté dans son passage à l’acte. La responsabilité du politique est de réfléchir sur ces conditions et de travailler à les améliorer.
La morale est nécessaire, mais le moralisme est mystificateur ...
L’ennemi à vaincre ici est, répétons-le, le moralisme. La revendication morale est légitime. Mais elle est insuffisante si elle ne s’accompagne pas d’un regard sur la situation des acteurs sociaux ; elle est mystificatrice si elle cherche à faire oublier cette situation. On peut souligner également que le moralisme comme principe de l’action politique est contradictoire. Car si la délinquance et la violence ne relevaient que de la volonté bonne ou mauvaise des acteurs sociaux, on ne voit guère quelle action politique pourrait être efficace. Son champ d’intervention c’est le groupe social, non les délibérations morales du sujet dans son for intérieur. C’est pour cette raison d’ailleurs que la seule réponse politique de la droite - qui se place volontiers sur le terrain du moralisme pour faire oublier ses responsabilités sociales - relève du dressage (en amont) et de la répression (en aval). La réponse politique de la gauche doit être plus exigeante, plus cohérente, et à terme plus efficace.
Quittant le terrain de l’idéologie, dans lequel s’enlise la droite, la gauche doit travailler à déterminer les causes réelles des problèmes et à leur appliquer un traitement adéquat. Plutôt que de dresser, elle cherchera à éduquer ; plutôt que de réprimer, elle cherchera à rétablir par des réformes profondes des conditions d’existence plus justes qui donnent la possibilité aux acteurs sociaux de faire leur chemin dans la société sans passer par la violence et la délinquance.
... et de toutes façons voué à l’échec.
Observons en tous cas les résultats d’une politique qui fait l’impasse sur cette problématique. Non seulement la répression est souvent injuste, mais elle est inefficace. Le fait que personne ne peut contester, c’est que la politique sécuritaire menée par Sarkozy a failli [1]. Non seulement la délinquance n’a pas diminué, mais elle est en constante augmentation - et singulièrement sous sa forme la plus grave, celle de l’atteinte physique aux personnes. L’objectif visé est-il le modèle américain, la guetthoïsation des « populations à risques », et l’incarcération d’une partie toujours plus importante de la population ?
Par l’effet de la même logique, que se passe-t-il quand la gauche oublie qu’il est dans son rôle de réformer en profondeur la société afin que chacun soit placé dans des conditions satisfaisantes pour réussir ? Que se passe-t-il quand elle travaille à maintenir le statu quo de l’ordre capitaliste, trahissant ses bonnes intentions électorales et les noyant dans un discours bien pensant, mais en oubliant de passer aux actes, ce qui en politique (comme en toutes choses) est la seule chose qui vaille ?
De « l’État qui ne peut pas tout » au discours sécuritaire de la nouvelle gauche.
Il y a un lien logique entre un fatalisme économique « l’État ne peut pas tout » [2]et le discours sécuritaire de la nouvelle gauche. L’État qui « ne peut pas tout », c’est l’État qui accepte le diktat du capitalisme mondialisé et refuse de changer en profondeur la donne du problème. Ainsi, ne travaillant plus sur les causes objectives du désordre capitaliste, la gauche traite ses conséquences de la même façon que ses adversaires de droite. Ayant accepté la façon de poser les problèmes de la bourgeoisie et de ses représentants politiques, elle ne peut qu’accepter les solutions qui en découlent. Doit-on s’étonner après cela que les électeurs préfèrent une position franche et qui ne s’embarrasse pas de scrupules dans le traitement de ces questions, à des propos et des politiques en demi-mesure, qui allient l’hypocrisie et l’inefficacité ?
Ségolène Royal et « la nouvelle donne » sécuritaire.
S’il est un terrain sur lequel Ségolène Royal a voulu marquer « sa différence », c’est bien celui de la sécurité. L’enjeu est de taille. On a dit, mais cela reste à prouver, que d’avoir négligé ce problème fut la cause de la chute de Lionel Jospin en 2002. Ce qui est certain, c’est que le bilan économique de Jospin n’étant guère attaquable, la droite a appuyé sur le thème sécuritaire pour disqualifier la gauche. Au terme d’une véritable opération de propagande bien digne d’un régime totalitaire ( on se souvient du passage en boucle dans les télés, ad nauseam, des violences infligées à un retraité agressé), les thèmes et les thèses du Front National ont été repris en coeur par les responsables politiques de droite. Le résultat fut la disqualification du candidat socialiste dès le premier tour, évincé pour la plus grande honte de ce pays par le candidat de l’extrême-droite.
En reprenant à son compte les thèses sécuritaires de la droite et de l’extrême-droite, Royal pouvait espérer faire « coup-triple ». D’une part répondre à la crise politique ouverte par la présence de Le Pen au second tour de la présidentielle de 2002 : puisque le système avait failli, les experts s’étant discrédités, c’est par le retour de la parole des « vraies gens », le sentiment vécu des citoyens, la « sortie du système » qu’on pouvait espérer regagner les suffrages perdus des français. Il y a un rapport direct entre la nouvelle « méthode participative » et le contenu des propositions de la candidate [3]. D’autre part doubler Sarkozy sur sa droite, le candidat de l’UMP, premier flic de France, ayant fait de la sécurité son cheval de bataille. Enfin, laisser ouverte la possibilité d’une entente avec Chevènement et la sensibilité autoritaire qu’il représente, de façon à ne pas être gênée sur sa gauche. C’était plutôt bien calculé et il faut reconnaitre que le succès fut au rendez-vous dans une première phase.
Mais il y a un prix politique à payer : quand la gauche décline le refrain de la sécurité sans l’accompagner de mesures réelles pour le rétablissement de la justice sociale - c’est à dire sans agir sur le seul terrain sur lequel des points pourront être marqués sur le long terme, elle perd la confiance de l’électorat populaire et d’une partie de la classe moyenne. La tassement actuel dans les sondages de la candidate socialiste n’a pas d’autre cause : pour l’électorat populaire, s’il s’agit de « rétablir la sécurité » autant aller chez Sarkozy, voire hélas chez Le Pen ... Après tout, le discours droitier n’est-il pas justifié puisque tout le monde le reprend ? Quant à la classe moyenne, une partie se sent menacée par la nouvelle figure qu’a pris le capitalisme mondialisé, et elle ne se reconnaît plus dans un discours populiste oublieux des fondamentaux socialistes. Le cas des enseignants est à cet égard révélateur.
Un arsenal de mesures hétéroclites et inadaptées
C’est au niveau des propositions concrètes que l’on mesure peut-être le plus le caractère idéologique (= coupé de la réalité) des propositions de Ségolène Royal en matière de sécurité.
– L’armée d’abord serait mobilisée pour remplir une nouvelle mission pour laquelle elle est loin d’être préparée. L’idée d’envoyer « dès la première incivilité » les jeunes dans des camps de rééducation placés sous la responsabilité de militaires est tout simplement délirante. Notons que « l’incivilité » n’est pas un concept juridique. Voilà la porte ouverte à tous les arbitraires. Et pourquoi les militaires seraient-ils à même de réussir là où les autres éducateurs ont échoué ? Tout simplement parce qu’ils n’éduquent pas, mais qu’ils dressent. On ne peut pas aller plus loin dans le reniement des valeurs qui fondent la gauche progressiste.
– Royal propose ensuite la mise en place de centres fermés. S’agit-il de rouvrir les maisons de correction de sinistre mémoire ? De l’idée, on est déjà passé à la réalisation expérimentale. Les résultats sont plus que douteux [4]
– La culpabilisation des parents : les jeunes enfermés, confiés à des « matons » ou à des « juteux », il s’agit de « rééduquer les parents » et de « les placer sous tutelle. » Peut-on imaginer un mépris plus flagrant à l’égard des familles populaires ? Plutôt que de s’interroger sur les conditions de vie réelles des gens qui expliquent les carences éducatives, il s’agit de disqualifier tout bonnement une frange de la population sur critères sociaux. Hier Ministre déléguée à l’enseignement scolaire, elle soutenait « l’enfant qui a toujours raison » ; aujourd’hui candidate droitière d’une gauche tourneboulée, elle stigmatise les parents défaillants. Malgré l’apparente contradiction (laxisme hier, autoritarisme aujourd’hui) il y a une réelle continuité de la pensée Royal : les familles pauvres ne sont pas compétentes. Cette fois-ci, les « vraies gens » n’y connaissent rien, il faut confier les problèmes à des experts.
Répondre à l’idéologie droitière par une analyse des conditions réelles de la vie des gens et travailler au rétablissement de la justice sociale.
Je le disais en débutant cet article, on ne résoudra pas les problèmes de la violence et de la délinquance - dont les premières victimes, il faut le rappeler aussi, sont les populations stigmatisées elles-mêmes - par un coup de baguette magique. L’idée sur laquelle il ne faut pas céder est quand même de remettre l’analyse à l’endroit et de pointer les vraies causes dans l’origine de ces problèmes. Travailler à la justice sociale, pour que l’ordre revienne, il n’y a pas d’autre impératif pour une politique de gauche qui mérite ce nom. Le « problème des banlieues » est à cet égard très significatif. Je m’appuierai donc pour terminer sur un rapport du Conseil d’analyse économique de 2003 [5]qui disait, bien avant les révoltes de novembre 2005, l’état de la situation dans ces territoires qui sont devenus de véritables zones de relégation.
Les auteurs de l’étude - Jean-Paul Fitoussi, Eloi Laurent et Joël Maurice - montrent, en s’appuyant sur de nombreux travaux, le fossé qui s’est établi entre les banlieues déshéritées et les communes riches. « Ainsi, à Paris, les revenus des ménages étaient supérieurs de 15,3 % à la moyenne régionale en 1996, alors que l’écart était deux fois moindre douze ans auparavant. La Seine-Saint-Denis, elle, a subi le phénomène inverse : en 1996, les ressources des familles étaient inférieures de 27,6 % à la moyenne des huit départements franciliens (contre - 18,5 % en 1984). Dans certaines communes défavorisées, comme Grigny (Essonne) ou La Courneuve (Seine-Saint-Denis), « le revenu moyen des foyers fiscaux » s’est écroulé (- 15 % en douze ans). » La cause de cette situation, c’est d’abord le chômage de masse.
« Sous l’effet de « vingt-cinq années de chômage de masse », les ZUS « divergent (...) de manière « catastrophique » », poursuivent les auteurs du rapport. Une tendance d’autant plus préoccupante qu’elle « est entretenue (...) par un véritable système ségrégatif ». Les inégalités sociales ont, en effet, tendance à se perpétuer « à travers les inégalités d’accès à l’éducation et à la formation, au logement et aux équipements collectifs ». Les riches sont de plus en plus riches, les pauvres de plus en plus pauvres. La pauvreté appelle la pauvreté, car elle produit la ségrégation, et conduit à une ghettoïsation de ces territoires. « C’est ainsi que certains quartiers se spécialisent « dans le logement de populations fragiles » et que s’amorce « une dérive vers la formation de « ghettos » », estime le CAE. Cette ségrégation, ajoute-t-il, est accentuée par le « fonctionnement libre du marché » : « Un ménage aisé est toujours prêt à payer un prix (...) de logement plus élevé qu’un ménage modeste » pour vivre dans des « pôles attractifs » (au regard de l’emploi, du système de soins, des établissements scolaires, etc.). Autour de ces zones privilégiées se forment donc « un premier cercle occupé par les ménages disposant des revenus les plus élevés, puis des couronnes circulaires successives rangées par ordre décroissant de revenus disponibles », analyse le CAE. »
Voilà bien un cercle vicieux. On souhaiterait que sa transformation en « cercle vertueux », expression chère à Ségolène Royal, passe par d’autres recettes que l’appel à des mesures autoritaires abracadabrantes d’un autre âge et qui de toutes façons ne résoudront aucun problème. Il faut que la gauche ancre à nouveau ses analyses du côté des réalités économiques en vue de l’établissement d’une vraie justice sociale. C’est à cette seule condition que des progrès significatifs en matière de sécurité sont possibles.
A lire également :
– La rupture tranquille
– L’ordre juste (1) : Invoquer « l’ordre » n’est pas une idée émancipatrice
– L’ordre juste (2) : Critique du discours sécuritaire de la nouvelle gauche
[1] Le bilan de la lutte contre la délinquance de Sarkozy a donné lieu à de vifs débats. On a reproché au ministre de l’intérieur de cacher les chiffres qui le dérangeaient : montée de la violence contre les personnes (+ 20 % depuis 2002), intensification des violences scolaires (+ 73,2 %) et explosion des violences urbaines avec plus d’un mois d’émeutes en novembre 2005.
[2] cf. la déclaration de Lionnel Jospin en 1999, lors des licenciements chez Michelin alors que la société engrangeait des bénéfices substantiels.
[3] Eric Debardieux, dans un article décapant paru dans Le Monde le 16 février dernier, mettait en évidence cette relation : « Une nouvelle figure du mépris politique s’est développée avec la campagne présidentielle en cours : celle du mépris pour les experts, les intellos, les chercheurs en sciences de l’homme [...] Nous avons des programmes qui ne se construiraient que dans le contact participatif, recevant l’onction d’un peuple enfin rencontré [...]Les sciences de l’homme existent justement car elles interrogent sans cesse, et sur le terrain, ce monde des « gens », avec des méthodes qui assurent que leurs pensées et leurs opinions ne sont pas manipulées. Elles ont aussi leur mot à dire sur les politiques proposées, pour éviter déception, perte de temps et mauvaise utilisation des deniers publics. Un exemple ? Si j’affirme que les centres fermés avec militaires sont une stupidité pour traiter la délinquance, ce n’est pas par idéologie antimilitariste, mais parce que la recherche évaluative en a montré l’inefficacité, voire la contre-productivité - sur le plan international. Mais cela a-t-il de l’importance ? La seule science de l’homme qui semble compter désormais est réduite à celle des sondages. »
[4] Agnes Franco, secrétaire générale du syndicat de la magistrature : « L’enfermement en tant que tel n’est pas un plus éducatif ... Les bilans, au-delà des chiffres, montrent que plus un CEF est ouvert sur l’extérieur, mieux ça marche, et que ceux qui mettent l’accent sur l’enfermement ont moins de résultat. »
[5] Bertrand Bissuel : Ce « système ségrégatif » qui conduit à la « dislocation de la cité », Le Monde, du 06.11.2003