Faites parler les données !

mercredi 28 juillet 2010 à 00:00

Le site Wikileaks, le New York Times, le Guardian et le Spiegel ont réalisé un gros coup ce dimanche 25 juillet 2010 en publiant et en laissant à disposition du public plus de 90000 documents confidentiels sur la guerre en Afghanistan. L’affaire est très bien résumée par un article de Davduf qui n’hésite pas à parler de « révolution en marche ». En tout cas, comme le souligne l’auteur, David Dufresne, c’est là une réussite éclatante du travail collaboratif de trois journaux à la réputation internationale et d’un site web encore relativement méconnu. L’initiative d’Owni qui propose au public français, en collaboration avec Slate.fr et Le Monde Diplomatique, « de participer à l’enquête liée à la plus grande fuite de documents classifiés de tous les temps » est aussi la preuve que de l’ouverture des données et des sources peut naître de grandes choses.

Bakchich fait remarquer que la presse française est pour l’instant très loin de cette logique : « En France, terre de mode, ne sied que les dossiers cousus mains, les révélations tamponnés. Enregistrement, PV, témoignage accablants. Un scandale clé en main oui. Mais du recoupement très peu pour nous merci. ». Même si Bakchich est un peu dur, on peut dire qu’il s’agit là encore, d’un bon coup de pied au cul de la presse française. Le « warlogs » de Wikileaks est aussi la démonstration qu’il n’y a pas qu’une façon de faire du journalisme et d’informer, et que quoi qu’il arrive, il ne s’agit pas d’une affaire de statut mais bien de travail, de volonté, d’imagination et d’innovation.

En tout cas, à l’Agitateur, cela nous encourage encore plus à demander aux pouvoirs publics locaux, régionaux ou nationaux de donner l’accès à tous aux données publiques. Car aucun doute, les données publiques seront une source majeure de l’information du XXIème siècle. Et comme elles sont payées par tous, elles doivent être accessibles à tous. Il en va de la démocratie.


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Faites parler les données ! - Charles-Henry Sadien - 28 juillet 2010 à 17:34

deux propos à mettre en rapport qui viennent du même site http://www.davduf.net

Le premier sur une culture du "slow journalism" (http://www.davduf.net/Warlogs-la-nouvelle-guerre-de-l.html)

Un des faits d’armes de cette bataille de l’info, c’est évidemment l’embargo imposé à trois des plus prestigieux titres de la presse mondiale. En effet, le New York Times, le Guardian et le Spiegel ont accepté — chose inédite — de travailler ensemble et en silence ; et d’attendre le 25 juillet pour faire feu, au moment même où Wikileads mettait en ligne ses documents. Le Guardian a ce mot, étonnant, dans le monde ultra-compétitif dans lequel la presse se débat : les journaux en question et Wikileaks ont scellé une « joint venture ». La masse d’informations à traiter impliquait une telle solidarité.

Jusqu’ici, cette solidarité se voyait parfois sur le terrain, entre deux reporters copains ; ou entre télévisions (pour des raisons techniques : satellites, lumières, batteries, K7) ; mais jamais à ce niveau, et jamais sur cette durée, jusqu’à dimanche.

Plus notable encore, cette alliance est aussi la marque du slow journalism, le journalisme lent, calqué sur le mouvement slow food, celui qui prend son temps, qui recoupe, qui évalue, pèse, doute, soupèse, et re-doute. Il faut des nerfs, ne pas craindre les fuites aux fuites, les tirs amis de la concurrence. Sur ce coup, le New York Times, le Guardian et le Spiegel ont été magistraux.

Dès la publication des warlogs, les deux premiers s’expliquaient d’ailleurs. Ils faisaient du méta journalisme, comme c’est devenu désormais l’usage, depuis l’irruption du Net comme aide logistique à la critique des médias. C’est ainsi qu’un rédacteur en chef du NY Times nous apprend que son journal « a passé près d’un mois à fouiller les données à la recherche d’informations et de tendances, les vérifiant et les recoupant avec d’autres sources. » Il ajoute que « Wikileaks n’a pas révélé la manière dont il a obtenu les fichiers, pas plus qu’il n’a été impliqué dans le travail journalistique des entreprises de presse ». Au détour de ce making of salutaire, on apprend aussi que chacun a pris ses responsabilités : la Maison Blanche, mise au parfum par le New York Times, qui légitimement lui demandait sa version des faits, a exhorté WikiLeaks à ne pas rendre publics des documents qui auraient pu nuire à la sécurité des troupes présentes sur place. Ce qui a été fait. On notera au passage le fair-play du bureau ovale (qui ne pouvait, de toutes façons, que constater les dégâts) : pas de pré-fuites, pas de diversion ante-publication, comme c’est bien souvent le cas en France.

Pour être complet, le slow journalism existait avant le slow journalism. Le New Yorker en est l’illustration parfaite, voir le portrait fleuve de Julian Assange publié en juin.

... et le second sur l’investigation appréhendé comme "le capitalisme le plus dur appliqué au journalisme" (http://www.davduf.net/Clearstream-A-Denis-Robert-en-ces.html) :

... Dans la salle d’audience, il doit y en avoir un qui ne twitte pas. Un qui ne quitte pas, ni ne lâche rien : le journaliste Denis Robert, à l’origine des révélations sur la banque d’affaires luxembourgeoise Clearstream. Et voilà quelques pisse-froid de la copie-rapide qui se jettent sur le bonhomme. Haro sur « le naïf », « l’hirsute », l’« écrivain mal rasé », sur le « lampiste », le gugusse gogo qu’a-même-pas-vu-que-Lahoud-était-un-manipulateur.

Pour comprendre une telle prose, il est bon de savoir comment grouille le monde des journalistes d’investigation de la presse parisienne. Ils sont une poignée à se partager des miettes judiciaires, qui font de bons titres et de gros gâteaux (ou l’inverse). Une poignée souvent plutôt bien payée (pas de problème avec ça) en échange d’une obligation de résultats : ramener du scoop. Au kilo. Sous plastique ou non, sous blister, avec ou sans alarme, mais le plus clinquant possible. Du front page, de la cover, du facing, de la tête de gondole. L’investigation, c’est le capitalisme le plus dur appliqué au journalisme : pas de quartier pour le voisin, pas de pitié pour le concurrent, je te nique, je vais vite. Tout le talent tient dans le flingage. Désormais, la boutique est ouverte 24h/24, dimanche compris. Faut que ça tourne et à plein régime avec ça ! Faut que ça abatte du boulot — et tant pis si ça abat au passage quelques voyelles et consonnes jetées en pâture. Faut être le premier sur le fournisseur (flic, juge, avocat, indic), le premier sur le client (lecteur, spectateur), à l’affût du bilan comptable (les revues de presse scrutées comme des bonus de fin d’année) et n’être pas toujours trop regardant sur la camelote (que signifie la vérité judiciaire ? Quelles sont les conditions du recueillement de la parole retranscrite ? En garde à vue ? Chez le juge ? Qui file les P.V., et pourquoi, et comment, et à qui, et pour qui ? Et pour combien de temps ? Etc). Dans l’investigation, désormais, tout n’est qu’une question de rentabilité et de plus-value express. Et de rotation : surtout, surtout, passer d’une affaire à l’autre. Ne pas creuser au delà de l’économiquement raisonnable, ne pas aimer ses sujets, ne pas douter, fureter toujours, et fourguer encore. « Et on fera une mise à jour sur le site, si on s’est planté, va... » A ce train là, l’investigation connaîtra bientôt son affaire Madoff ou Kerviel.

journalisme "open source" versus journalisme "chasseur de primes" ?


Faites parler les données ! - Mister K - 28 juillet 2010 à  18:15

Sans le faire exprès, j’ai traité du sujet Denis Robert dans ma réponse précédente. Mon point de vu, c’est qu’il a peut-être travaillé un peu trop seul sur le sujet. Tout simplement.

journalisme "open source" versus journalisme "chasseur de primes" ?

Je pense qu’opposer les modes de fonctionnement est une connerie. C’est complémentaire, cela ne s’oppose pas. Le journaliste qui investigue à l’ancienne (ou de façon traditionnel plus exactement) n’est pas plus un chasseur de prime que celui qui travaille différemment. Un chasseur de prime est un chasseur de prime, peut importe la façon de travailler. Mais j’ai comme idée que quelqu’un qui chasse la prime ferait mieux d’être commercial que journaliste....

Répondre à ce message #27924 | Répond au message #27921
Faites parler les données ! - Charles-Henry Sadien - 28 juillet 2010 à  18:23

ournaliste qui investigue à l’ancienne (ou de façon traditionnel plus exactement) n’est pas plus un chasseur de prime que celui qui travaille différemment.

pourtant, l’auteur oppose bien le slow journalisme, décrit de façon très "noble", à une description un peu dégoutante du journalisme d’investigation à la recherche perpétuelle du truc énorme qui va "buzzer" comme disent les journaleux geek.

Répondre à ce message #27925 | Répond au message #27924
Faites parler les données ! - Mister K - 28 juillet 2010 à  19:18

pourtant, l’auteur oppose bien le slow journalisme, décrit de façon très "noble"

Cette façon de voir les choses est simplement le miroir de ceux qui considèrent l’investigation comme noble et le reste (le commentaire ou le "journalisme de données") comme moins noble. Les deux logiques me paraissent idiotes. Il n’y a pas qu’une façon de faire et surtout, tout le monde sera amené à utiliser toutes les méthodes afin d’informer le citoyen en même temps ou de façon alternative. Sinon, je ne suis pas certain que « le slow journalisme » ce soit uniquement du journalisme de données. Pour moi, c’est de l’investigation sous toutes ses formes. Je pense que le terme est d’ailleurs explicite : slow veut dire "lent", bref, qui prend son temps par rapport à de l’information fast-food. Après, il y a des informations qu’il faut (ou que l’on peut) avoir rapidement (les bouchons sur les autoroutes, le résultat d’un match etc) et d’autres qui nécessitent du temps et de l’analyse. Là encore, le slow ou le fast, c’est pas si simple.

à la recherche perpétuelle du truc énorme qui va "buzzer" comme disent les journaleux geek.

Attention, à terme, tous les journaleux seront "geek" un jour ou l’autre. Là, nous sommes dans une période de transition ou certains refusent d’utiliser des moyens dits "modernes". Mais bon, c’est un peu comme si ils refusaient d’utiliser le téléphone. Ce qui compte, ce ne sont pas les moyens employés, mais bien l’objectif à atteindre.

Cliver sur les méthodes, créer des catégories de journalistes en décidant en filigrane ce qui est noble ou ce qui ne l’est pas, et ce sans prendre en compte le contexte, le sujet etc, c’est absurde. Le "journalisme d’investigation" sur Johnny Halliday, c’est noble ? Pourtant, les "photographes", ils sont bien sur le terrain ;-)

Répondre à ce message #27926 | Répond au message #27925
Faites parler les données ! - Charles-Henry Sadien - 28 juillet 2010 à  21:18

Cette façon de voir les choses est simplement le miroir de ceux qui considèrent l’investigation comme noble et le reste (le commentaire ou le "journalisme de données") comme moins noble.

ah bon. C’est une interprétation. On peut aussi dire que c’est une vision de gens qui dans l’exaltation du moment mettent en évidence l’intéret des "nouvelles méthodes" en descendant les pratiques "classiques" qui ont tout de même mis en prison quelques hommes politiques et contribué à l’Appel de Genève contre la corruption en Europe. J’ai davantage l’impression que c’est cela. Car à l’inverse, n’ai pas vu beaucoup de journaleux dégobiller sur ce journalisme de donnée (qui n’est pas si nouveau que ça : c’est la formation et le boulot de serial griffeuse !) alors que c’est pour eux un outil supplémentaire dans leur travail.

Après si on ne se sert que d’un outil, ben ça va pas bien loin. Il y a un site très en vogue où les journalistes passent leur temps a surfer sur le web pour trouver les articles les plus intéressants (ou jugés comme tels par rapport au lectorat qu’ils souhaitent toucher) pour les intégrer et en faire le relais. Pourquoi pas mais quand les mecs font que ça à longueur de journée et que le site ne comporte que des trucs qui ne sont pas des production originales, ça revient à ne considérer qu’une partie du métier à savoir la hiérarchisation de l’information.

Attention, à terme, tous les journaleux seront "geek"

j’observe quand même qu’il y en a parmi ces autoproclamés "journalistes geek" qui en font des tonnes et pensent avoir inventé l’internet alors que jusqu’à une période très récente le milieu journalistique n’avait rien compris à l’intéret d’internet et étaient complètement à la traine. Pour faire branchouille, ils ne jurent que par tweeter ou facebook, ajoutent des tonnes d’anglicismes (d’abord on dit "data journalism" ça fait mieux que "journalisme de données") se construisent un véritable jargon (pour paraitre plus intelligent ou pour faire croire que leur boulot est vachement compliqué ?) et bavent à volonté sur la presse papier (souvent avec raison, mais quand même, il faut aussi savoir profiter de son expérience et de son bilan sans rejeter tout en bloc). Résultat (je me fais un peu l’avocat du diable) : on a l’impression de journalistes qui font de grandes théories, donnent des leçons à la "vieille presse papier" regardent le nombril de leur métier mais n’ont jamais réussis à sortir aucun papier d’envergure jusqu’ici.

Et puis le journaliste ne sera pas que geek : il sera une espèce de cyborg fait de journalisme, d’informatique, de marketing (on commence à évoquer les "journalistes auto-entrepreneurs" (ça fait mieux que "pigiste précaire"... quoiqu’il s’agit souvent d’un pléonasme).

enfin, je suis un peu dubitatif sur cette notion de "web communautaire" avec ces tribus qui ne se mélangent pas, mais c’est un autre sujet...

Répondre à ce message #27928 | Répond au message #27926
Faites parler les données ! - Mister K - 28 juillet 2010 à  22:27

Oui, enfin, je continue à penser qu’il y a plus d’une façon de faire et que opposer les méthodes et créer des catégories de journalistes n’a pas lieu d’être. Les journalistes évoluent et évolueront, rien de plus normal.

Le véritable enjeu pour moi, c’est de faire en sorte que les données publiques soient accessibles à tous. Les exploiteront, ceux qui voudront bien les exploiter, journalistes ou pas. Ce sera un plus important, ça ne fera pas tout. Mais le chemin est encore long. Nous sommes encore dans une logique où la rétention d’information est source de pouvoir. Et c’est cette logique de secret et de rétention qu’il faut changer. Dans le domaine de l’information et des données, comme dans celui de la culture, le partage n’appauvrit personne et enrichit tout le monde. C’est bien le sens initial de cette brève je pense...

Répondre à ce message #27933 | Répond au message #27928
Faites parler les données ! - Charles-Henry Sadien - 28 juillet 2010 à  22:34

Oui, enfin, je continue à penser qu’il y a plus d’une façon de faire et que opposer les méthodes et créer des catégories de journalistes n’a pas lieu d’être. Les journalistes évoluent et évolueront, rien de plus normal.

je n’ai pas dit le contraire.

Le véritable enjeu pour moi, c’est de faire en sorte que les données publiques soient accessibles à tous. Les exploiteront, ceux qui voudront bien les exploiter, journalistes ou pas. Ce sera un plus important, ça ne fera pas tout. Mais le chemin est encore long. Nous sommes encore dans une logique où la rétention d’information est source de pouvoir. Et c’est cette logique de secret et de rétention qu’il faut changer. Dans le domaine de l’information et des données, comme dans celui de la culture, le partage n’appauvrit personne et enrichit tout le monde. C’est bien le sens initial de cette brève je pense...

c’est une évidence. sur la rétention d’information, j’en avais discuté beaucoup avec philippe bensac au moment du bouquin, qui disait exactement ça, que l’information est une source de pouvoir, (variante de le pouvoir, c’est le savoir et l’éducation) et on le voit à quel point : quand on émet des doutes sur quelque choses la réponse c’est "vous ne savez pas, moi je sais car j’ai les données.

Répondre à ce message #27934 | Répond au message #27933
Faites parler les données ! - Mister K - 28 juillet 2010 à  22:47

philippe bensac au moment du bouquin, qui disait exactement ça, que l’information est une source de pouvoir,

Oui, bon, c’est hors-sujet, mais il faudrait lui rappeler maintenant qu’il est adjoint NTIC à la mairie de Bourges. Ce serait bien qu’il passe à l’action dans le domaine. Ce ne sont pas les intentions qui comptent, ce sont les résultats. Sur le peu que j’ai vu, je ne suis pas certain qu’il soit dans une logique de publication des données publiques. J’ai plutôt l’impression qu’il cherche des excuses en tous genres afin de ne rien faire dans le domaine... Pour l’instant, il a créé un "intranet" où les conseillers municipaux peuvent récupérer quelques documents. Faudra juste qu’il nous explique pourquoi seuls les conseillers municipaux ont officiellement accès à ces documents...

Répondre à ce message #27936 | Répond au message #27934
Faites parler les données ! - Charles-Henry Sadien - 28 juillet 2010 à 17:03

Le journalisme de données, c’est bien, mais ne miser que là-dessus en récupérant des données bien installé devant son ordinateur, ce n’est pas la panacée non plus. Beaucoup de scandales ne relèvent pas d’un travail sur des données (voir les deux articles sur le fiasco de l’IMEB que j’ai publié sur ce site, même si j’ai pu glaner quelques infos sur le net) : ça demande de rencontrer des gens, de les interroger, de recouper l’info etc. Par exemple, le travail d"enquête sociale" d’un journal comme Fakir ne se base pas sur des données mais sur des réalités humaines. Le passage de Bakchich est plus que "un peu sévère", il est carrément caricatural : même s’il semble faire allusion au travail sur l’affaire bettancourt où les journalistes commencent à devenir les instruments du procureur et d’une juge d’instruction, le travail d’investigation des journaleux professionnels ne se limite pas à attendre que l’info vous tombe dans les bras. Il n’y a qu’à lire les livres de Denis Robert (Pendant les affaires, les affairent continuent) qui expliquent le cheminement et le travail accompli pour arriver à sortir une info.
Par ailleurs, les données, c’est bien de les avoir, mais il faut aussi savoir les analyser. En comptabilité, on pourrait me mettre les chiffres les plus scandaleux sur le nez, il est probable que je n’y verrais rien. Donc "travail, volonté, imagination et innovation", oui, mais il faut ajouter, sans doute aussi "compétence". Et j’ajouterai aussi "le temps" pour un non professionnel.


Faites parler les données ! - Mister K - 28 juillet 2010 à  18:05

Le journalisme de données, c’est bien, mais ne miser que là-dessus en récupérant des données bien installé devant son ordinateur, ce n’est pas la panacée non plus.

Oui. C’est bien pour cela que la brève dit « le « warlogs » de Wikileaks est aussi la démonstration qu’il n’y a pas qu’une façon de faire du journalisme ». En clair, récupérer des données est un plus. Ne pas les avoir est pénalisant. Après, tout dépend des sujets. Sur de nombreux sujets, si l’on avait les données, le citoyen serait plus en capacité de juger qu’actuellement. C’est indéniable.
Sinon, on peut être très efficace « bien installé devant son ordinateur » et être inefficace en sortant le cul de son bureau. Il n’y a pas de règles. Les moyens de communication sont désormais multiples. Encenser "le terrain" pour brûler le reste est une connerie. D’autant plus que ce ne sont pas toujours ceux qui encensent "le terrain" qui en font le plus...Bon, c’est vrai, sur le terrain, il y a les bars ;-)

Il n’y a qu’à lire les livres de Denis Robert (Pendant les affaires, les affairent continuent) qui expliquent le cheminement et le travail accompli pour arriver à sortir une info.

Denis Robert qui est un très bon journaliste, s’est quand même bien fait piéger dans l’affaire Clearstream. Pire, dans l’histoire, le vrai sujet, l’opacité des flux financiers a été occulté et étouffé par une sombre histoire toujours pas très claire d’ailleurs. Il n’a donc pas repéré que "l’informaticien" de l’affaire était un peu « chelou ». Personne n’est infaillible. D’où l’intérêt de travailler à plusieurs.

Par ailleurs, les données, c’est bien de les avoir, mais il faut aussi savoir les analyser. En comptabilité, on pourrait me mettre les chiffres les plus scandaleux sur le nez, il est probable que je n’y verrais rien. Donc "travail, volonté, imagination et innovation", oui, mais il faut ajouter, sans doute aussi "compétence". Et j’ajouterai aussi "le temps" pour un non professionnel.

Cet argument est le même que pour les logiciels libres avec l’accès aux sources "encore faut-il savoir les comprendre et les utiliser". Certes. Mais la logique n’est pas une logique individuelle mais une logique collective et collaborative. Si tu ne sais pas lire des chiffres comptables, d’autres savent les lire. Et c’est tout l’intérêt d’un travail collaboratif, c’est que sur la masse, les compétences, ça se trouve. Pareil pour le temps. C’est bien d’ailleurs l’intérêt de l’initiative d’Owni : comme analyser les 90000 documents est un travail de titan, ils essaient de répartir le travail avec toutes les personnes qui le souhaitent. Donc l’argument de la compétence n’enlève rien à l’intérêt des données. Mais malheureusement, c’est un argument souvent employé afin de justifier la non-publication de données publiques : « de toute façon, personne n’y comprendrait rien ». Cet argument est fallacieux et sert surtout aux politiques à justifier l’injustifiable.

Bon, après, nous sommes bien d’accord, les données ce n’est pas tout. Mais ce n’est pas rien, loin de là...

Répondre à ce message #27923 | Répond au message #27920